Cela faisait trois ans que nous n'avions plus de nouvelles de Charlie Winston. L'homme s'est depuis débarrassé de son chapeau et par la même occasion du personnage de cow-boy folky dans lequel il commençait à se sentir à l'étroit (lire l'interview qu'il a offert à Music Waves pour plus d'infos). Après avoir traversé une période de doute, le voici de retour avec un album très personnel.

Enregistré et produit en mode solo par un Charlie Winston désireux de ne laisser personne influer sur son projet, "Curio-City" présente une facette plus urbaine et moderne de l'artiste (à l'image de sa pochette). Nappée d'éléments électros qui pourraient surprendre à la première écoute, la musique de l'artiste progresse dans une certaine continuité et son côté pop/soul garde une vraie fraîcheur et une patte reconnaissable (son phrasé unique, sa rythmique à la guitare, les touches de piano).

Tout débute avec 'Wilderness'. Enlevé et léger, presque printanier, il va brusquement s'alourdir sur un refrain à la rythmique plombée. Piano éthéré et mélodie profonde viennent nous rassurer d'emblée, le talent de Winston est bien là et son nouvel univers s'impose aisément. Tout va se lier ensuite avec beaucoup de talent. 'Truth' et 'Fear & Love' (à la mélodie asiatique) teintés de soul, 'Say Something' habité du filet de voix unique du  londonien  (mais desservi par la rythmique électronique), 'Another Trigger' aux influences folk et 'Lately' sifflé et entraînant sont autant de moments qui se rappellent vite à votre souvenir. Le languissant 'Too Long' et ses claviers à la "Blade Runner" (l'un des films qui a inspiré Winston pour cet album) ou 'A Light (Night)', plus profonds, reflètent bien tout le génie de l'artiste qui propose ici des titres très visuels, habités de cette ambiance urbaine et hypnotique et sur lesquels il vient ajouter sa touche personnelle et parfois surprenante comme ces vocalises presque africaines sur la toute fin du second.  'Just Sayin' et sa rythmique funky et le superbe 'A Light (Day)' apportent des couleurs autant que nécessaire et contribuent à l'équilibre de l'ensemble. 

Voici donc un objet artistique tout à fait cohérent, un voyage au milieu des tours et parcs urbains de Londres, une belle histoire (que 'Stories' clôt avec délicatesse) dans laquelle les fans de Charlie Winston n'auront pas à s'inquiéter pour peu qu'ils ne soient pas totalement allergiques à la musique électronique, celle-ci étant qui plus est jouée avec une certaine âme. Tout au plus pourrions-nous bouder un petit manque de profondeur et de nuances dans la prise de son et le côté organique de la rythmique qui fait défaut sur la longueur (le revers de la médaille quand on travaille seul me direz-vous, Ruahdri Cushnan n'étant là que pour donner de l'unité au mixage original de Winston). Mais nous parlons ici de détails.