Nous n’attendions plus vraiment de nouvel album de The Prodigy. Et pourtant, 6 années après leur précédent album, voici venir "The Day Is My Enemy".
Entre ces deux disques, le groupe n’est toutefois pas resté inactif, et il y a lieu d’imputer ce délai à un souci de perfection et à une gestation dont la durée renvoie le requin-lézard (42 mois) au rang d'un hamster (15 jours). En effet, le groupe a commencé très tôt à travailler sur ce sixième album (en 25 années d’existence, ce qui est déjà un signe !), puisqu'il a commencé à tester certains des titres de cet album sur scène dès 2011.
Pour autant, les Britanniques n’ont pas mis à profit ce temps pour révolutionner leur musique. Car le style, comme le son, de The Prodigy, sont immédiatement reconnaissables. Nous avons toujours affaire à cette musique électronique très musclée, et structurée par des rythmiques puissantes, avec une recherche d’équilibre entre ambiances dansantes et univers sombres. Une sorte de techno alternative et fortement charpentée. On peut même avancer que le groupe semble avoir opéré un retour au style développé dans ses deux premiers albums, en y adjoignant un son encore plus massif. Ainsi la présence de 'Rebel Radio', et à plus forte raison de 'Nasty' sur "Music For The Jilted Generation", le second album du groupe ne serait pas choquante.
Et le résultat sonne « sérieux ». Ce qu’il faut entendre par là, c’est que les compositions sont très bien construites et la production est de tout premier ordre. Cela sent le travail consciencieux, et l’investissement. Comme si le groupe s’était appliqué à bien coller à la signature musicale de The Prodigy. Et c’est peut-être un peu là que le bât blesse : à trop vouloir préserver son identité, le groupe se révèle un peu prisonnier d’un format aisément reconnaissable et un tantinet prévisible.
Et ce petit défaut est renforcé par le fait que The Prodigy n’a pas lésiné sur la quantité : 14 titres présentés, c’est beaucoup. D’autant plus que le résultat se révèle être très dense et guère aisé à digérer. Cela ne remet pas en cause la qualité des compositions proposées. Celles-ci sont efficaces et portées par une production impressionnante. Simplement, ce "Day Is My Enemy" comprend trop d’informations, présentées avec un vocabulaire musical un peu trop étroit et évident. Ce qui rend le propos parfois un peu abscons et dispensable ('Destroy').
De fait, ce disque semble surtout s’adresser aux néophytes en la matière, ainsi qu’aux fans purs et durs. Les personnes qui attendent de The Prodigy qu’il fasse évoluer son propos en seront pour leurs frais. Si le groupe se révèle impressionnant de maitrise pour ce qui est de la forme, il peine à se montrer totalement convaincant sur le fond en ne parvenant à se montrer novateur et aventurier qu'en de trop rares occasions, comme cela peut être le cas avec 'Wild Frontier'. Une prudence qui tranche avec l’image anticonformiste que le groupe cherche à donner depuis ses débuts ...