A n'en pas douter, S.U.P est passé maître dans l'art de l'expérimentation contre-nature : non content de proposer des albums expérimentaux et glauques qui font froid dans le dos, le groupe veut toujours pousser le concept le plus loin possible. Après "Chronophobia", conte ultra-moderne et glacial, et la réécriture de "Anomaly", la formation nordiste propose un témoignage de cette époque bouillonnante. Toutefois, comme S.U.P. ne fait jamais les choses comme tout le monde, il veut baigner cette prise de son dans un concept global. C'est pour cela que le disque est enregistré live... sans public ! Une idée saugrenue de prime abord, mais qui s'avère brillante, car il n'y a pas de meilleur moyen pour saisir à la fois la fureur et la froideur de leur musique désincarnée.

Le groupe a capté sur rondelle, un moment de sa vie, que ce soit sur ses terres nordiques pour les sessions post-"Chronophobia", par des enregistrements datant de l'époque "Cube" ou par des chutes issues de répétitions, ou encore par quelques autres surprises. En effet, comme à son habitude, le groupe prend ses fans à contre-pied. Les jumeaux ont donc choisi de piocher dans leurs anciennes productions sonores et proposent un patchwork sombre de quinze années de bruit et de fureur. Nous découvrons ainsi les indispensables 'Chronophobia', 'Like A WickerMan' et 'Room Eleven' issus de "Chronophobia", 'Pain Injection' issu de "Anomaly", ou encore l'indispensable et dantesque 'The Cube'. Le tout est servi par des interprétations magistrales qui surpassent celles des albums studio. Nous sommes dès lors emportés par ces versions impeccables et glaçantes comme le héro de "Chronophobia" pris dans les glaces arctiques. Surnagent aussi dans cette nécropole musicale d'autres pépites telles que le délicat '1308.JP.08'.

Le groupe donne également à savourer une version sombre du 'Angel' de "Morcheeba" ainsi qu'une réinterprétation de 'Shout', tube interplanétaire dans une version plombée, ralentie, étalée, très Doom finalement. Il démontre ainsi qu'il est non seulement une machinerie futuriste crasseuse, mais surtout un groupe versatile.  Il offre une ultime cerise sur le caveau de ce (un-)live: ce 'Fou' en duo avec Christian Décamps, et prouve ainsi que les compositions prog peuvent facilement s'habiller du noir apparat du grunt caverneux.

"To Live Alone" est un instantané décharné et glacial ; un OVNI que tout amateur de S.U.P doit découvrir car, même si les interprétations sont relativement proches des originaux, s'y retrouve la force bestiale, la technicité sans faille et les ambiances glauques de ce groupe intense.