Pour la première fois depuis le début de sa carrière discographique, Ratt a mis plus d'un an à proposer un nouvel album. Il faut dire que, malgré ses qualités, "Dancing Undercover" (1986) commençait à laisser apparaître un début de manque d'inspiration, le quintet répétant une formule, certes efficace, mais ne marquant aucune évolution notable. Les deux années séparant ce dernier opus de la nouvelle livraison intitulée "Reach For The Sky", laissent espérer une certaine remise en question. La pochette s'éloignant enfin des sempiternelles playmates semble aller dans ce sens, même si Beau Hill est à nouveau crédité à la production pour laquelle il a finalement été appelé en renfort d'un Mike Stone devant l'assurer seul à l'origine.
Tous ces espoirs semblent se réaliser à l'écoute d'un début d'album qui voit les rongeurs californiens sortir enfin du moule dans lequel ils semblaient s'être enfermés. L'introduction sur fond de bruits de travaux publics de 'City To City' débouche sur un riff plus lourd qu'à l'accoutumée. Le refrain se fait catchy et quelques légères variations de tempo confirment que Ratt fait enfin évoluer sa formule, même si la voix de Stephen Pearcy reste toujours aussi particulière. 'I Want A Woman' revient sur des rails plus classiques mais reste imparable avec un refrain irrésistible, et est suivi du sommet de cet album. En effet, 'Way Cool Jr.' balance un groove obsédant, renforcé par une section cuivre qui n'est pas sans faire penser à Aerosmith. Surprenant et rafraîchissant, ce titre est taillé pour cartonner sur les ondes US et confirme que le quintet est enfin capable de proposer une évolution notable à sa musique.
Malheureusement, la suite ne se révèle pas à la hauteur de l'enthousiasmant trio d'ouverture. Les quelques tentatives supplémentaires de mutation ne décollent pas totalement, que cela soit 'Don't Bite The Hand That Feeds' et son refrain punchy ou 'I Want To Love You Tonight' qui voit les ricains se frotter à l'exercice de la power-ballade aux atours bluesy pour un résultat un peu poussif. Quant à la deuxième partie d'album, elle retombe dans une formule ultra-classique qui fait illusion le temps d'un 'Chain Reaction' rapide et accrocheur, mais rentre dans le rang dès un 'No Surprise' dont le groove ne décolle pas autant que sur le grand frère 'Way Cool Jr.'. Bien que sympathique, le reste n'offre aucun intérêt particulier, si ce n'est celui d'une recette récitée sans faute mais sans passion.
Si les efforts de remise en question sont évidents, ils ne sont pas poussés assez loin pour permettre à Ratt de franchir le palier supplémentaire qui les aurait fait entrer dans la catégorie des groupes ayant confirmé les espoirs placés en eux après 2 premiers albums incontournables. Au lieu de ça, les Californiens semblent rentrer dans le rang aux côtés de formations certes talentueuses et bénéficiant d'une identité bien affirmée, mais donnant l'impression de tourner en rond. Pour échapper à un oubli progressif, les tentatives d'évolutions entamées sur ce "Reach For The Sky" devront être poussées plus loin et sur la durée complète d'un prochain album qui s'annonce déjà décisif.