Grâce à sa renommée acquise pour le meilleur avec ''La Isola di Niente'' avec une tournée nord-américaine à la clé et pour le pire avec son deuxième album traduit en anglais, ''The World Became The World'', la production de Premiata Forneria Marconi passe d'îles insignifiantes à des états unis. Cependant, ce serait une erreur de considérer ''Chocolate Kings'' comme un instrument de conquête du marché américain.
Le groupe a fait appel à un soliste fixe, en la personne de Bernardo Lanzetti (Acqua Fragile) qui va mettre son organe au service de la langue anglaise. Son chant théâtral, souvent comparé à celui de Peter Gabriel, mais dont les vocalises particulières rappellent celles de Roger Chapman (Family), pourrait apparaître comme une régression pour un groupe qui a toujours cherché à se démarquer de ses modèles. A l'écoute de la chanson éponyme, on pourrait penser que PFM a changé. Ce morceau reflète une politique de concision, se reposant sur des rythmiques plus agressives épaulées par le chant extraverti de Bernardo Lanzetti et le violon de Mauro Pagani, qui cosigne le morceau.
Exercice de séduction ? Si la pochette fait référence aux tablettes de chocolat distribuées par les GI pendant la libération de l'Italie en 1945, la pochette intérieure montre le paquet aux couleurs américaines chiffonné pour être jeté à la poubelle... La chanson fait montre d'un anti-américanisme virulent, pointant du doigt les bonnes intentions premières transformées en mondialisme sauvage, mais finalement incapable de survivre à sa propre indigestion (la version européenne parodie ''Sept ans de solitude'' de Billy Wilder en dévoilant la ''Big Fat Mamma' des paroles, une Marilyn Monroe obèse fumant une cigarette).
Car PFM n'a pas dit son dernier mot. Dès l'introduction de 'From Under', le groupe se place sous la protection d'un Yes de la grande époque, sans tomber dans le plagiat ou la redite. La chanson traversera des zones subtropicales, déchaînées par le clavier de Flavio Premoli et des zones plus tempérées par l'apport du violon. Ce dernier très présent sur l'ultime piste 'Paper Charms' ne compensera pas le manque de réactivité général du morceau. C'est sur 'Harlequin' et 'Out Of The Roundabout' que l'amateur de progressif jettera une oreille attentive. La première sous le patronat de Genesis se démarque de son modèle en offrant une ballade étincelante assez proche de 'Geranio' sur ''Per Un Amico'' (qui possédait des accointances avec... 'Harlequin' de Genesis!) sublimée par les guitares acoustiques et la voix de Bernardo Lanzetti lorsqu'il chantonne la mélodie, et par le solo de violon final. La seconde use également d'une recette symphonique pour nous inviter à une agréable promenade progressive rythmée par une batterie intrépide.
''Chocolate Kings',' suicidaire dans son propos mais innovant dans sa forme, a logiquement échoué à donner au groupe milanais une célébrité mondiale dont il avait la clé entre les mains. Mauro Pagani, pourtant très actif sur cet album, quittera le groupe, ce qui pour la plupart des fans constituera la fin de l'âge d'or pour le groupe (et pour les plus extrêmes, pour le rock progressif italien).