Si c'est de moins en moins le cas depuis quelques années, essentiellement en raison de conflits mal gérés entre les deux frères Robinson, les Black Crowes ont longtemps été de véritables machines à composer. Il en a résulté un grand nombre de titres non utilisés, et même deux albums n'ayant jamais vu le jour. Ce sont ces derniers qui ressortent enfin des tiroirs à l'occasion de ce "The Lost Crowes" permettant de découvrir "Tall" après douze ans d'attente (1994), et "Band" (1997) qui, de son côté, n'aura patienté qu'une dizaine d'années. Remixé par Paul Stacey, l'ensemble est évidement d'un intérêt inégal, il permet cependant de découvrir de nombreux petits joyaux qu'il aurait été dommage de laisser méconnus.
Bien que le plus fourni avec 16 morceaux, "Tall" n'est pas forcément le plus intéressant des deux disques composant ce coffret. En effet, la plupart des titres a depuis été réutilisée, essentiellement pour "Amorica" (1994), mais également pour "Three Snakes And One Charm" (1996) comme ce fut le cas pour 'Evil Eye'. Si certains ont vu leurs titres plus ('Lowdown' devenu depuis 'Ballad In Urgency') ou moins modifiés ('London P.25' devenu 'P.25 London' ou Hi-Head Blues' transformé en 'High Head Blues'), d'autres ont profité de nouveaux mix lors de leur parution. Ce fut particulièrement le cas des bonus track de certaines éditions (la ballade instrumentale folk 'Sunday Buttermilk Waltz' ou le catchy 'Song Of The Flesh'). Mais si c'est toujours un immense plaisir de pouvoir écouter des petits chefs d'œuvres tels que 'Wiser Time' ou 'Descending', le principal attrait de l'édition de cet opus vient de quelques inédits qui auraient mérités de voir le jour depuis longtemps. Passons sur un 'Dirty Hair Halo' dispensable et brouillon, pour insister sur le délice représenté par 'Feathers', longue ballade aérienne gorgée de feeling, 'Tornado', délicate pièce de folk sudiste acoustique, et 'Thunderstorm 654' alternant couplets mélancoliques et refrains enjoués.
Moins fourni en nombre de titres, "Band" l'est plus en inédits, seul 'If It Ever Stops Raining' ayant été utilisé pour "By Your Side" (1998), alors que 'Peace Anyway' a servi de face B pour ce même album. Quant au saccadé 'Paint An 8', il fut partiellement recyclé au sein de 'Come On' sur "Lions" (2001). Pour le reste, si "Tall" laissait essentiellement découvrir des titres tout en délicatesse, "Band" propose une belle série de titres dynamiques, souvent entraînants ('Another Roadside Tragedy', 'Predicable'), bénéficiant de refrains catchy et accrocheurs ('Never Forget This Song'), ou flirtant avec la pop anglaise ('Grinnin' '). De son côté, 'Lifevest' laisse se développer les éléments folk pendant que la ballade 'My Heart's Killing Me' vient à nouveau prouver le talent sans limite des Black Crowes dans cet exercice, renforçant la mélancolie à l'aide des interventions d'un violon.
Essentiellement dédiée aux fans du groupe, cette compilation d'inédits ne manque cependant pas d'intérêt pour tous les amateurs de la musique des Black Crowes, révélant au passage quelques gemmes qu'il aurait été impardonnable de laisser dépérir dans l'anonymat. Sans être totalement incontournable, "The Lost Crowes" mérite tout de même que chaque amateur de ce rock authentique et riche en émotions, y porte attention afin de découvrir quelques pépites à l'occasion.