Il aura suffi à Ghost deux albums et un EP pour s'imposer sur la scène hard rock mondiale. Et qu'on aime ou qu'on déteste, le groupe ne
laisse définitivement pas indifférent. Rappelons pour ceux qui
en douteraient que, depuis ses débuts, Ghost a toujours joué un hard rock teinté de pop aux mélodies imparables et à l'univers
pro-sataniste grand-guignolesque, que cela soit sur le cheap mais
glacé "Opus Eponymous" ou le pompeux et très orienté
chant "Infestissumam".
Et la formule ne changera pas sur ce
très bon "Meliora". Si son look peut prêter à
sourire, le groupe assure avec toujours autant de professionnalisme et leur musique
et leurs mélodies restent de très grande qualité. Si Papa Emeritus
change de grade au fil des albums, il reste bien évidemment la seule
et unique voix du Fantôme et si son chant évolue encore (il se fait
parfois plus posé et grave), il se fait moins
omniprésent que sur le précédent effort pour laisser plus de
place aux guitares et claviers.
En bien des aspects, "Meliora"
sonnera comme le plus solide album de la congrégation à ce jour.
Chœurs et claviers ouvrent la messe sur une froide
mélodie avant l'arrivée d'une lourde batterie. Dès 'Spirit' et
ses toms écrasants, on comprend pourquoi les ghouls ont jeté leur
dévolu sur l'ingénieur du son plutôt pop qu'est Adam Kasper. Ce
dernier parvient à donner au groupe le poids qui lui manquait sur
"Infestissumam" et qui vient contrebalancer la voix légère
de Papa Emeritus dans un ensemble soudain évident. La basse qui
introduit 'From The Pinnacle To The Pit', par exemple, n'a jamais
sonné aussi hard rock, même si le solo de guitare semble un peu
noyé. Plus loin, le lourd single 'Cirice', dont l’intro évoque
biens des canons du metal de Dream Theater à Slayer, est tout
simplement énorme et gorgé d'une ambiance des plus glauques à
l'image de son clip.
'He
Is', dont l'idée date d'il y a déjà sept ans, n’est pas le plus
féroce des brûlots mais atteint des sommets mélodiques grâce à
une légère mélopée où piano et guitare acoustique tissent une
trame mélancolique du meilleur effet, alors que 'Mumy Dust' (autre
titre riche en chœurs et au solo de claviers assez moderne) renoue
avec le registre blasphématoire du groupe. Et si les textes sont
moins crus et choquants que ceux de "Infestissumam", on
aime entendre Papa nous susurrer à l'oreille des paroles infâmes et
toujours riches en consonances latines.
L'écrasant mid-tempo
'Majesty', qui révèle son côté addictif au fil des écoutes,
débute tel un très bon Deep Purple au refrain excellent pour ne
jamais faiblir en route et prouve qu'ici le groupe laisse respirer sa
musique comme jamais auparavant, apportant à ses titres un nouvel
aspect conceptuel et une assise bien plus en phase avec le style
développé, même sur l'éclatant 'Absolution' qui aurait presque pu
trouver sa place sur le premier méfait des Scandinaves.
Ce court
album s'achève sur un 'Deus In
Absentia' grave et lumineux à la fois et où les lignes de piano et
de basse prouvent une fois encore la volonté du groupe à proposer
un travail ciselé. Ces deux derniers titres, piqués à l'AOR, montrent également un Ghost plus sobre mais pas moins éclatant.
Deux courts instrumentaux ('Spocksonat' et 'Devil Church') complètent cet album
intelligemment agencé qui ne fera pas tache dans la discographie
du groupe et qui devrait même, une fois apprivoisé, mieux vieillir
que ses prédécesseurs. Définitivement, Ghost est un vrai groupe, même si on ne sait
toujours pas, au sein de cette bande d'anonymes, quels musiciens aduler.