Depuis quelques années, Mike Tramp s'est engagé dans une démarche relevant du voyage initiatique. Parcourant les Etats-Unis par ses propres moyens tout en y délivrant une cinquantaine de concerts par an, le chanteur souhaitait revenir à des choses authentiques, loin des strass qui avaient pu brouiller sa vision lors d'un début de carrière au succès colossal. Que cela soit au sein de White Lion ou de Freak Of Nature, le Danois avait eu toutes les raisons d'être aveuglé par la renommée qui n'avait pas manqué de l'assaillir. Témoins de sa quête, les albums "Cobblestone Street" (2013) et "Museum" (2014) se devaient plus d'être considérés comme des instantanés de son évolution, avec leurs défauts et leurs qualités, mais avec une honnêteté méritant le respect. Conclusion de ce triptyque discographique, "Nomad" représente une forme de validation de cette démarche.
Et si la filiation avec ses deux prédécesseurs ne peut être niée, la maturité du nouveau venu est impressionnante. Les guitares sont encore souvent acoustiques mais elles sont intégrées à un ensemble qui fait la part belle à l'électricité, même si nous restons dans un genre Rock-Folk qui privilégie les mélodies et les ambiances dignes des grands espaces nord-américains. Mike Tramp s'est entouré d'une formation complète et équilibrée au sein de laquelle Soren Andersen délivre quelques jolis soli sans faire d'esbroufe, alors que l'orgue Hammond de Morten Buchholz étoffe la production et apporte son inimitable chaleur. Le tout est enrichi par des paroles d'une profondeur qui se fait souvent rare dans le milieu, rapprochant l'œuvre de Mike Tramp d'artistes intelligents et engagés tels que Bruce Springsteen, Neal Young ou Bob Dylan.
De cet ensemble cohérent et sans faille, nous retiendrons également quelques refrains hyper accrocheurs s'insinuant au plus profond de votre cortex écoute après écoute ('Give It All You Got', 'High Like A Mountain'). La mélancolie s'invite également à plusieurs reprises, mais sans jamais tomber dans le lénifiant ('Counting The Hours', 'Who Can You Believe'). Bien au contraire, se mettant au diapason des paroles, la musique délivre une énergie positive et communicative. Et si cohérence il y a, il ne faut pas la confondre avec une linéarité qui n'est pas d'actualité sur "Nomad". Là où 'Wait 'Till Forever' offre un riff plus lourd et appuyé, 'No More' se fait simple et direct pour favoriser l'efficacité du message délivré. Alors que 'Stay' se révèle frais et envoûtant, 'Live To Tell' privilégie une émotion à fleur de peau, paysage à la beauté apaisée et flamboyante. Enfin, nous n'oublierons pas 'Bow And Obey' alternant les moments de découragement et les appels à se redresser face à l'injustice, ainsi que 'Moving On', parfaite chanson de clôture dont les sonorités d'orgue au charme suranné rappellent Procol Harum et les 60's.
En arrivant au terme de son voyage initiatique, Mike Tramp valide l'ensemble de sa démarche et délivre un album attachant et lumineux. "Nomad" ne se contente pas d'être un superbe album : il rend cohérents ses deux prédécesseurs, étapes nécessaires pour atteindre la plénitude de ce dernier opus. A la fois authentique, réfléchie et mélodique, voilà une œuvre que tous les amateurs de Rock, de Folk et de paroles intelligentes devraient apprécier à sa juste valeur.