Graveworm est passé maître dans l'art des reprises improbables ; le groupe adore prendre des chansons cultes et les exploser en un magma sonore étouffant. Ainsi, même si sa musique est ultra-violente, elle a toujours pour finalité la mise en lumière de mélodies, comme sur leur reprise de 'Loosing My Religion' avec voix grunt et rythmes qui tabassent les oreilles. Les membres du combo semblent moins à leur aise sur leurs compositions originales, ou peut-être plus dans la norme. Dès lors, s'ils aiment déstructurer les chansons des autres, ils préfèrent garder une structure solide et classique sur les leurs.
L'opus commence par une partie de guitare acoustique intimiste ('The Death Heritage'), comme une veillée au coin du feu. Cette réunion de boy-scouts tourne rapidement au cauchemar avec l'entrée en scène de la six-cordes plongée dans des entrailles sanguinolentes et une batterie marteau-pilon qui fait trembler les édifices titanesques. 'Blood Torture Death' file à cent à l'heure mais contient quelques césures plus lentes, comme si le groupe voulait rompre avec son étiquette speed. Cette rupture se poursuit sur 'To The Empire Of Madness' qui démarre dans une cavalcade effrénée pour finir de manière plus intimiste avec une très belle guitare sèche. 'Stillborn' joue aussi avec les contrastes, débutant avec violence, puis rompt avec cette hargne par un instant d'apaisement parsemé d'instruments lumineux : un violon aérien et un piano cristallin... Cela rappelle beaucoup le magnifique 'Into Illusion' de Mors Principium Est dont il semble être le grand frère.
La production est massive, précise, découpée au scalpel, et met en lumière chaque seconde de violence. Les instruments unissent leurs forces pour décimer la dernière once d'humanité qui reste en nous : c'est violent, même très violent, ça gicle et ça explose dans tous les coins. La guitare est grasse, les riffs omniprésents et les rythmes ne mollissent jamais. Les claviers apportent le brin d'humanité que la guitare semblait avoir annihilé. Enfin, la voix crie comme un porc que l'on égorge, ses intonations traînent à la fois dans les profondeurs abyssales, crasseuses et glauques, ou dans des hauteurs aigrelettes et arides qui font froid dans le dos.
"Ascending Hate" est un album paradoxal. Le groupe semble vouloir diversifier son propos et sortir d'un carcan death peut-être trop exigu, construisant un death plus accessible par des mélanges de textures, de couleurs et d'instruments. Les musiciens demeurent toutefois de grands faiseurs de mélodies et d'hymnes taillés pour le live. Cet album ravira donc les amateurs de métal généraliste plus que les adorateurs de la mort ou du diable.