Il aura fallu 6 années aux Belges de Neo-Prophet pour donner un successeur à "Monsters", pépite néo-progressive fort joliment acclamée lors de sa sortie. Durant cette période, l'équipe s'est quelque peu modifiée, puisque deux compatriotes du groupe de space-prog Quantum Fantay sont venus remplacer les titulaires du clavier et de la guitare initiaux.
Mais si l'équipe a évolué, la recette quant à elle est restée inchangée : comme son préfixe l'indique, Neo-Prophet œuvre dans le néo-progressif, de celui qui reprend les recettes (usées diront certains) jadis déclinées à foison dans les années nonantes, mais remises au goût du jour dans une déclinaison percutante. Dans un style qui évoque bien souvent Shadowland, auquel on aurait adjoint une touche de Saga, le quatuor belge pose les bases de sa musique sur une guitare rythmique tranchante qui aurait presque fait figure de hard-rock dans les années 80, et de gros sons de claviers, soit en accompagnement sous la forme de nappes synthétiques, soit en soli ravageurs. Là encore, impossible de ne pas évoquer Clive Nolan tant les sonorités déployées par Pieter van den Broeck se rapprochent de celles de l'anglais.
Pour compléter le tableau, l'indispensable guitare solo vient poser de nombreuses interventions toutes plus lumineuses les unes que les autres, la combinaison de tous ces ingrédients trouvant son apogée dans l'excellent instrumental 'The Hour-Glass', au cours duquel les instrumentistes se défoulent les doigts avec bonheur !
Pourtant, tout ceci ne serait rien, ou du moins pas grand-chose, si ces ingrédients ne se trouvaient utilisés au service de mélodies imparables, truffées de rebondissements en tous genres, aussi bien mélodiques que rythmiques. Comme sur "Monsters", le groupe n'hésite pas à changer de tonalité ou à rompre une mélodie pour la remplacer par une autre, permettant ainsi à l'auditeur de garder tous ses sens en éveil.
Alors bien sûr, les mauvaises langues pourront arguer que les cadences marillionesques à cinq temps façon 'Grendel' présentes dans la suite 'Orchestral Death' ont été déjà mille fois entendues et réutilisées par de nombreux groupes. Certes, mais l'utilisation qui en est faite ici s'intègre parfaitement au néo dynamique en diable de Neo-Prophet, et un titre comme 'Divide and Divide' qui synthétise parfaitement cet esprit se révèle tout bonnement emballant.
Pour contrebalancer (légèrement) ce tableau jusqu'alors idyllique, on pourra juste regretter quelques petits coups de mou (c'est finalement dans le gros son que le groupe est le plus efficace) que les plus aficionados assimileront à des respirations bienvenues et pointer également du doigt la surenchère de certains passages flirtant avec le côté pompeux que les détracteurs du genre exècrent.
Pas suffisant en tout cas pour gâcher le plaisir des adeptes d'un néo-progressif bien caréné, suffisamment intelligent pour marier plaisir immédiat et multiplication des écoutes. Les amateurs du genre vont adorer tandis que les habituels opposants à ce style de progressif n'en seront qu'un peu plus confortés dans leur position.