Existant pourtant depuis 2006, Inside Mankind ne sort qu'en 2015 son premier album, "Oikoumene" (qui signifie en grec le monde connu, c'est à dire au-delà duquel se trouvent les barbares), se présentant avec un line-up bien différent de celui d'origine, puisque seul le batteur était dans la formation de départ. Au travers du déluge de notes par lequel s'expriment les différents protagonistes, il n'est pas si aisé de cerner la musique des Italiens dont on pourrait qualifier le style dominant de métal progressif.

La musique peut rappeler à de nombreux moments Symphony X, si ce n'est par son intelligence technique et inventive, au moins dans le phrasé progressif et sa grande densité, ou également Dream Theater, incontournable du genre même si les Italiens ne sont clairement pas dans l'imitation. Et comment ne pas penser à Nightwish ou Within Temptation avec le chant de Claire Briant qui manie la voix de tête lyrique à la façon de Tarja Turunen ('Out of The Loop') comme la puissance expressive de Floor Jansen ('Fourty') ou encore la finesse mélodique de Sharon Den Adel ('Magdalen') ? La technique vocale est d'ailleurs impressionnante tant le chanteuse est capable de passer d'un registre à l'autre sans frémir et avec une aisance insolente. Elle est parfois doublée ou complétée par un chant death/black qui lui donne encore plus de relief.

Cet atout maître n'est toutefois pas le seul attrait de cet album. En effet, tous les musiciens donnent une impression de facilité troublante, que ce soit dans les effets de manche ou la célérité des claviers. Les différents styles effleurés démontrent aussi la richesse de la palette que le quintet maîtrise, que ce soit le métal néo-classique agressif façon Kenziner sur 'Toccata', le développement mélodique sur 'Magdalen', le refrain entrainant et efficace de 'City', la ballade avec 'Uneasy' ou encore le pur prog death metal sur 'Phariseum', 'Human Divine', longue pièce finale, présentant de façon réussie l'intégralité du spectre d'Inside Mankind.

Pourtant tout n'est pas parfait dans cet univers musical. En effet, il faudra de nombreuses écoutes pour appréhender cet album qui possède des aspects dérangeants au premier abord. Tout d'abord ce déferlement de notes qui semble frôler la démonstration froide et insipide. Le premier titre 'Out Of The Loop' va dans tous les sens et ressemble à un défouloir pour des musiciens en manque d'expression. Si bien que les vocalises lyriques apparaissent par moments comme totalement en décalage avec le reste de la musique, même si le refrain est de nature à rassurer. Heureusement, au fur et à mesure de l'enchaînement des morceaux, cette impression s'estompe pour laisser la place à une certaine admiration et un respect pour le sens mélodique et une relative prise de risque créative.

Le coup d'essai ne se transforme donc pas en coup de maître, la faute à une envie de tout faire et de tout montrer mal maîtrisée. La richesse du métal progressif puissant et mélodique d'Inside Mankind pourrait trouver son public si le groupe démontre sa capacité à mieux circonscrire son sujet, avec plus de finesse et de mesure.