Voilà l'album qui aurait pu être le chant du cygne de la célèbre formation anglaise (et il n'aurait pas démérité à cette place) car il faudra attendre ensuite huit longues années de sommeil avant de voir le groupe se reformer. Et à l'image de son titre on ne peut mieux choisi, "Rock Art" présente Magnum sous son jour le plus inspiré et construit, après la douce incartade "Keeping The Night Lite Burning" sorti l'année précédente. On sent bien dès 'We All Need To Be Loved' que le groupe a faim et envie d'en découdre face aux nouvelles vagues Grunge et Pop.
Le groupe, Clarkin en tête, va alors piocher dans ses racines Blues ('Hush A Bye Baby'), Soul et Rock pour proposer un petit bijou parfois empreint d'une touche légèrement électronique dont il aurait pu se passer. Bref, Magnum fait ce qu'il sait faire de mieux mais en allant régulièrement voir ailleurs, essayant d'incorporer à sa musique de nouvelles sonorités, d'autres influences, tentant d'autres expériences afin de se renouveler.
'Hard Hearted Woman', aussi concise que possible, enfonce le clou du Rock dur et groovy (on s'attendrait presque à un solo de piano-bar). Bob Catley tient ici une forme inégalée à ce jour (il porte à lui seul la superbe ballade piano 'Back In Your Arms Again'), et la basse de Wally Lowe claque d'un son métallique sur tout l'album. 'Rock Heavy' va apporter une touche de Reggae sur ses couplets sans pour autant sonner déplacé (quel talent chez ces Anglais), alors que le classique 'Tall Ships' orné de pedal steel et un 'Tell Tale Eyes' aux consonances easy Rock N' Roll bien ancré dans son époque sonneront un peu trop facile pour être honnêtes.
Mais le panache revient très vite avec le grave 'Love's A Stranger', AOR racé aux claviers proéminents, le solide 'Just This Side Of Heaven' (un des joyaux de cet album), qui va démarrer tout en douceur pour offrir ensuite un Rock fin et solide et 'On Christmas Day', traitant de la fraternité spontanée observée sur le front durant la première guerre mondiale en 1914. Ce final, très visuel et poignant, presque épique (cette envolée sur le solo), restera un des plus beaux titres composés par Clarkin à ce jour.
"Rock Art" mériterait une bien meilleure place dans la discographie du groupe, mais les fans de longue date, eux, ne l'ont jamais oublié. Avec une telle maturité en 1994, on ne s'étonne plus du succès constant émaillant chaque sortie du groupe dès le début du XXIème siècle.