Le premier album de Renaissance Of Fools fut une heureuse surprise par la qualité intrinsèque de celui-ci autant que par le retour de Daniel Magdic, un des artisans du riff et du son des premiers disques indispensables de Pain Of Salvation. Quatre ans après "Fear Hope & Frustration", le groupe a subi de profonds changements avec les départs du chanteur-guitariste à la voix puissante Kjell Sjostrom et du bassiste Bjorn Tauman. C’est une vieille connaissance qui reprend le flambeau à la basse puisque Kristoffer Gildenlöw, en complément de Linus Carlsson,  fait son entrée dans le groupe (sur trois morceaux) emmené par un Daniel Magdic seul à la six-cordes et par le chanteur David Engström.

"Spring" débute par une véritable démonstration d’intelligence de composition avec un ‘Counting Down’, rappelant par certains riffs le Pain Of Salvation des débuts, qui exploite la fibre progressive de Daniel Magdic dans un titre évolutif qui fixe les ambiances. D’emblée la puissance inhérente à "Fear Hope & Frustration", dont la voix rauque de Bjorn Tauman était un des vecteurs, est moins étouffante et plus tranchante. Tout au long du disque, l’énergie est bien maîtrisée, circonscrite à des moments clés pour donner du relief ou lier les parties (les riffs imparables du milieu de ‘Scars’ et ‘State Of Oppression’), et côtoie une musique riche de sonorités de guitares (‘On Your Knees’), de textures variées (le très enchantien ‘Internal Carousel’) et de mélodies addictives (le génial ‘State Of Oppression’). Le chant étendu de David Engström et les splendides harmonies de chœurs qui ornent tout l’album (‘On Your Knees’) participent à adoucir la musique de Renaissance Of Fools, dont le métal progressif mise plus sur la mélodie que sur la technique. 

L’interlude 'Prelude' fait une jonction entre les trois premiers titres aux contenus diversifiés et les quatre suivants liés par une thématique qui donne son nom à l’album. Le professeur en sciences sociales et histoire qu’est Daniel Magdic a été très marqué par les révoltes populaires dites du printemps arabe en 2010, durant lesquelles une partie du peuple avide de démocratie à fait plier les dictatures en place, notamment en Tunisie et en Egypte. Les quatre dernières pièces explorent ces événements selon deux points de vue, celui du dictateur et des opprimés, et traitent de la révolution elle-même puis de ses suites. La force du propos politique développé est mise en musique de manière subtile, avec de nombreuses références arabisantes ('Prelude' et ‘Revolution’) et des temps forts faisant parfaitement écho au déroulement des événements (la partie instrumentale crescendo de ‘Revolution’), débutant par un révolté ‘On Your Knees’ et finissant par l’épilogue ‘A New Dawn’ qui clôt un impressionnant "Spring" sur un mid-tempo wilsonien lumineux et optimiste.

La qualité de composition et de finition, sans faute ni longueur, atteinte par Renaissance Of Fools dans ce "Spring" est impressionnante car les Suédois arrivent à proposer une musique complexe et expressive, consolidée par de brillantes parties instrumentales, tout en conservant une grande fluidité et une aisance d’écoute. Avec "Spring", Renaissance Of Fools confirme les espoirs que "Fear, Hope & Frustration" légitimait au-delà des attentes. Partant d’un capital de composition très fertile, le groupe a su faire évoluer sa musique pour aboutir à un modèle du genre.