Si depuis sa formation en 1995, Myon est un habitué des changements de direction artistique, hésitant régulièrement entre Heavy-Metal et Hard-Rock, bien que gardant toujours des composantes mélodiques et progressives dans sa recette, les choses se sont accélérées depuis quelques années. Car il ne faut pas se fier à l'absence de nouvel album depuis 2007 ("Frameworks") et penser que la vie du combo originaire d'Oulu est restée aussi calme que le tempérament général des habitants de sa Finlande natale. Alors que la sortie du single 'Built By The Distance' en 2011 laissait entrevoir une nouvelle orientation vers un AOR Progressif à la Saga, le sextet est ensuite devenu quintet avec le départ non remplacé du guitariste Risto Silenius, et surtout, celui du frontman Jukka Nummi. Ce dernier ne brillait pas particulièrement par un charisme hors norme, mais il ne manquait pas d'un talent dont il fait désormais profiter Stargate.
Malheureusement pour Myon, il n'est pas certain qu'il ait gagné au change avec un Marco Mannermaa jusqu'alors inconnu et ayant régulièrement du mal à cacher ses limites sur ce nouvel opus. La direction prise en 2011 se confirme et nous avons clairement affaire à une inspiration venant du gang des frères Crichton. Mais si les musiciens assurent dans l'ensemble, en particulier en multipliant les duels entre guitare et claviers sur de très bons soli à rallonge, il sera impossible de confondre le nouveau vocaliste avec Michael Sadler. En difficulté lorsqu'il doit faire preuve de plus de puissance ('Mystery Of The Moment', 'When It Could Begin'), manquant de profondeur sur les titres les plus délicats ('In The Arms Of Eternity'), sa prestation générale manque d'assurance et représente le principal point faible de cet album qui souffre également d'une production handicapée par des claviers aux sonorités souvent datées et par une batterie la plupart du temps triggée.
Voilà qui est dommage car les raisons de s'intéresser à ce "Vitalworks" ne manquent pas et les choses commencent particulièrement bien avec le single 'Otra Vez', titre inspiré par un tango argentin et au refrain en espagnol se révélant hyper accrocheur. Il est clair que les Finlandais ne se réfugient pas dans la facilité, se lançant dans des compositions syncopées et déstructurées ('Twist In The Orbit', 'Chains Of Society'), ou jouant sur l'alternance de couplets calmes et de refrains énergiques ('Blood Mountain', 'No Pain No Gain'). Myon est même capable de varier les ambiances en conservant le tempo inchangé sur 'Call Of The Senses', titre parmi les plus intéressants. Si l'ensemble manque malgré tout d'accroches, l'interprétation instrumentale est sans faille. Les soli sont d'un haut niveau laissant apparaître une technique et une vélocité largement au-dessus de la moyenne. La section rythmique n'est pas en reste avec une basse se faisant parfois plus prégnante et laissant apparaître quelques belles lignes ('When It Could Begin', 'Finally Forgiven').
"Vitalworks" est typiquement le genre d'album laissant un sentiment partagé entre d'une part, le respect de la démarche et des risques pris par le groupe, et de l'autre, des faiblesses trop perceptibles pour être ignorées. Si rien ne semble rédhibitoire, il est cependant surprenant de constater de pareilles erreurs de la part d'un groupe ayant une telle expérience. A gommer rapidement sous peine de rester définitivement dans l'ombre d'une influence (Saga en l'occurrence) face à laquelle la comparaison n'est pas tenue sur tous les points.