Par "metal fusion", on entend souvent un mélange de metal et de jazz, en référence au jazz fusion, lui-même une savante mixture de jazz et de rock. Mais il existe d'autres types de fusions et avec les Japonais on peut s'attendre aux plus improbables. Ainsi, Crossfaith, combo déjanté originaire d'Osaka, officie dans un metal aux frontières du metalcore, de l'electro, du death et du heavy. Leur précédente production avait divisé la rédaction de Music Waves en 2013, mais "Xeno" pourrait bien réconcilier tout le monde.
Pour cela il faudra passer le premier écueil de l'intro très clubbing à la Bob Sinclar. Le décor est planté, mais la suite avec 'Xeno' plonge l'auditeur au cœur du domaine de prédilection de Crossfaith, un metal hybride à l'introduction metalcore suivie d'un heavy dont les parties en chant clair rappellent Avenged Sevenfold (A7X). C'est le cas également de nombreux autres titres comme 'Raise Your Voice', 'Paint It Black' ou 'Wildfire' dont les riffs heavy et les rythmiques percutantes montrent que Crossfaith a su évoluer pour s'éloigner du cliché electronica dont il avait du mal à s'extirper lors des précédentes productions.
Les plus gros efforts ont visiblement porté sur l'écriture. L'ensemble reste très brutal mais de nombreuses parties plus mélodieuses émaillent la quasi-totalité des pistes qui bénéficient de variations rythmiques et mélodiques bienvenues. Là où les Japonais misaient tout sur l'énergie et le chant death, ce sont désormais des refrains plus accessibles comme sur 'Devil's Party' ou 'Calm The Storm' qui apportent une variété intéressante. A ce titre, il faut signaler le chant très expressif de Kole Kenta dont les screams ou les phases claires sont très convaincants et pratiquement sans le moindre accent, permettant d'oublier l'origine du groupe, une gageure pour un combo nippon.
Les touches electro sont désormais cantonnées à quelques intros ('Dystopia', 'Ghost In The Mirror'), à des breaks hypnotiques ou à des nappes enivrantes conservant l'essence même du groupe. Seul 'Wildfire' est composé comme un titre électro-metal mais le résultat est tellement groovy et entraînant que la mayonnaise prend, malgré des clichés boum-boum. En fin d'album, les Japonais nous surprennent avec une ballade (si, c'est possible) 'Tears Fall', elle aussi très typée A7X, ainsi qu'un instrumental, 'Astral Heaven' qui étonnera par sa dimension progressive à la Giorgio Moroder et qui démontre les qualités d'écriture qui animent le groupe.
Crossfaith évolue tout en conservant son style propre et son identité musicale. Fidèle à ses principes, le groupe enrichit et diversifie sa musique qui reste brute et énergique. Ce "Xeno" contient tout de même les ingrédients pour que l'album trouve son public dans une frange d'amateurs de metal brutal mais pas trop, electro mais pas trop, en tous cas original sans modération. A noter que l'édition Deluxe intègre le EP 3 titres 'Madness' de 2014 également présent pour prouver que le groupe est en perpétuelle évolution.