Venu d’Allemagne, KariBow a la particularité d’être une formation qui au fil du temps (elle existe depuis vingt ans déjà) a pris la forme d’un groupe, d’un one-man project ou d’une entité bicéphale. Pour sa dernière production, "Holophinium", c’est le format groupe qui est adopté, Oliver Rüsing, cheville ouvrière de KariBow, s’étant entouré de quelques musiciens afin de pouvoir défendre son album en concert.
"Holophinium" est un copieux double album composé d’un premier CD ("The Fragments") comprenant dix titres indépendants et un second ("Letter From The White Room") constitué d’une suite de 36 minutes déclinée en sept tableaux. La musique de KariBow est clairement typée néo-prog : il s’en dégage un sentiment de puissance dû aux multiples couches d’instruments superposées, à un jeu vigoureux et à des mélodies souvent enlevées qui emportent l’auditeur dans un maelström auditif. Guitares et claviers se partagent les nombreux (mais souvent trop courts) solos tandis que la batterie, omniprésente, cabotine parfois un peu sans que cela ne soit réellement gênant. Le chant est parfaitement adapté au genre, assez rentre-dedans, faisant preuve d’une énergie jamais démentie.
Bien que le style musical soit assez proche, il existe néanmoins de légères différences entre les deux disques. Le premier album teinte son néo-prog d’une pointe d'AOR sur certains titres au format plus calibré FM alors que le second le pare plutôt de touches atmosphériques, ajoutant des samples et des passages murmurés pour lui donner une crédibilité progressive, bien que finalement la suite ne soit qu’une succession de titres indépendants enchaînés les uns aux autres, sans reprise de thème ni fil rouge d’une atmosphère musicale commune. "The Fragments" fait ainsi penser à des groupes comme Saga, Marillion et Arena alors que "Letter From The White Room" rappelle beaucoup plus Sylvan (flagrant sur ‘Lifelong’ notamment) parfois saupoudré d’atmosphère floydienne (‘Orbital Spirits’).
Les compositions sont agréables mais rarement surprenantes. Il leur manque parfois un zeste de fantaisie, une pointe de déchirement pour dépasser le stade de l’écoute plaisante mais sans plus. L’album est d’ailleurs fort copieux et il est conseillé de limiter l’écoute à un album à la fois (le format le permet aisément) sous peine d’indigestion, le manque de nuances (on est un peu trop dans la débauche d’énergie et la profusion d’instruments) finissant par lasser.
"Holophinium" est un album agréable et interprété avec conviction (plusieurs invités prestigieux dont Michael Sadler ou Sean Timms honorant d’une présence amicale certains titres) et qui, malgré un léger manque d’originalité, devrait facilement plaire aux amateurs de néo-prog.