Depuis douze ans, avec une régularité qui force le respect, Circle II Circle vient nous rendre visite, toujours emmené par celui qui a contribué à maintenir en vie Savatage en succédant à Jon Oliva derrière le micro. D'aucuns regretteront que le groupe, avec de nombreux disques au compteur, soit encore et toujours associé à l'ancien port d'attache de son chanteur.
Mais, et nonobstant la qualité du séminal "Watching In Silence", ses auteurs auraient-ils bénéficié de la même exposition sans cette précieuse filiation ? Il est probable que non, d'autant plus que les Américains ne peuvent se vanter d'avoir enfanté un album à la hauteur de ceux gravés par son aîné, même avec Zak Stevens au chant. Ceci étant, à part les vocalises reconnaissables entre mille de ce dernier, les deux formations ont-elles vraiment un rapport entre elles ?
De fait, à la flamboyance épique de Savatage, Circle II Circle a toujours privilégié un heavy metal plus classique, sombre aux entournures et suffisamment technique pour se voir accoler sur le coin de la figure l'étiquette "progressive power metal", autant de traits qu'illustre "Reign Of Darkness", (déjà) sa septième cuvée. Sans surprise, l'opus s'inscrit dans le sillage de ses prédécesseurs, brochette de titres puissamment mélodiques emballés avec l'assurance et le professionnalisme de vieux routiers du genre.
Rien ne dépasse, c'est très bien fait. L'inspiration au garde-à-vous, le groupe signe quelques très belles perles, telle que 'Victim Of The Night', amorce comme toujours séduisante traversée par les lignes vocales superbes du maître des lieux cependant que les guitaristes exécutent une partition nerveuse. Fidèle à une écriture immuable, Circle II Circle s'enfonce dans un tempo souvent plombé qui lui réussit il est vrai plutôt bien, à l'image de 'Untold Dreams' ou de 'Somewhere', pour ne citer que deux exemples.
L'ombre de Savatage ne manque pas de planer par moments, influence évidente sur la power-ballad terminale 'Solitary Rain' laquelle, sans égaler son tutélaire modèle, séduit grâce à la présence conjointe du claviériste Henning Wanner et d'un Zak dont la voix emporte tout quand bien même il a quelque peu perdu de sa fougue de jadis.
Burné et bien troussé, "Reign Of Darkness" défile donc agréablement sans faute de goût quoique sans la moindre once d'originalité, à l'image de son titre horriblement quelconque. Du coup, il peine à marquer durablement la mémoire. En cela, il ne devrait pas corriger la réputation d'un groupe certes techniquement irréprochable, encore capable de livrer des mélodies captivantes mais dépourvu d'âme, qui fera finalement toujours la différence avec un Savatage jamais remplacé. Bref, un disque de plus...