On croyait tout savoir sur le death depuis toujours, ces corps mutilés sans détour, ces cœurs arrachés reposant sur du velours. Puis te voilà, Necroblaspheme et ton "Belleville", qui transpire à outrance la saleté et la peur ... La formation délivre une musique poisseuse dans la lignée du death historique, de Cannibal Corpse ou encore Obituary.
Emmenée par un hurleur inhumain, qui ferait passer John Tardy pour un chanteur à midinettes, le combo délivre une performance qui fait froid dans le dos. Les paroles sont vomies à la face de l'auditeur tandis que la guitare gorgée de graillons saturés délivre des rythmes mid-tempo. La batterie tabasse les oreilles par un jeu lourd comme du fioul échappé d'un supertanker, qui nous englue tel des goélands piégés dans cette poisse.
Le voyage cauchemardesque débute par des accords crasseux qui tissent des harmonies paranormales ('Rempart'), vient alors un cri déchirant, que l'on jurerait baigné de bile ... Le groupe sait ralentir le propos, construire des pistes d'ambiance, des incartades musicales très cinématographiques dignes du meilleur de John Murphy, mais manie aussi le blast ravageur et les cris suraigus en une copulation vibratoire presque black ('Such a Lot'). Les ambiances se superposent, s'allongent, introduisent des pistes glaciales ('Gouffre'), les contrastes se multiplient : des mises en bouche plombées, tempérées par des accélérations jubilatoires ('The Grande Boars Haunting') comme sait si bien le faire Obituray.
"Belleville" est un disque éprouvant, une incarnation musicale d'un monde désespéré, de bas-fonds infernaux où se côtoient les ombres de cadavres décharnés, les épaves égorgeurs d'enfants et les toxicos hagards au teint cadavérique. La rondelle, même si elle souffre de quelques faiblesses, est de belle qualité, bluffante parfois et souvent prenante, les musiciens habiles sont au meilleur de leur forme. L'opus plaira aux fans d'underground, aux amateurs d'épouvante, pas ceux attirés par la grandiloquence de "Scream", mais plutôt ceux qui ont été terrorisés (ou subjugués) par "Hellraiser" et ses visions mortifères dérangeantes.