The Exploding Eyes Orchestra n'illustre pas seulement la solide entente entre les membres de Jess And The Ancient Ones dont la majorité - cinq sur sept - se retrouve dans ce nouveau projet, il témoigne avant toute chose de l'incroyable sève créatrice qui coule dans les veines de Thomas Corpse, principal ordonnateur des deux entités, guitariste et compositeur prolifique ne cessant d'amasser du nouveau matériel.
Alors certes, il est bien entendu permis de s'interroger quant à l'utilité pour le Finlandais de se disperser de la sorte alors que Deathchain (surtout) et Winterwolf (un peu moins), dans des registres différents car plus extrême certes, l'occupent déjà par ailleurs. Pour l'intéressé, la réponse est pourtant simple : The Exploding Eyes Orchestra lui permet de livrer des compos incompatibles avec le répertoire de Jess And The Ancient Ones, et qui sinon seraient restées dans un tiroir.
Les deux groupes sont-ils néanmoins si différents que cela ? De loin, nous serions tentés de répondre par la négative, ne serait-ce déjà parce que le chant de la divine Jess, prêtresse au(x) charme(s) très personnel(s), s'avère tellement reconnaissable qu'il tend forcément un pont entre les deux. De fait, ses admirateurs, toujours plus nombreux, ne seront ni dépaysés ni déçus par ce galop d'essai. 'The Smoke", qui en ouvre les portes avec une sombre volupté, ne dépareillerait ainsi pas vraiment sur un album de son aîné, quand bien même s'y glissent de discrètes teintes psyché auxquelles les Finlandais nous avaient peu habitués.
De près, en revanche, la réalité se révèle dans sa complexité. Au doom façonné par son faux frère-jumeau, The Exploding Eyes Orchestra préfère un art plus délicat à cerner, moins lourd peut-être, plus influencé par les années 70, comme tend à le démontrer la présence affirmée de claviers antédiluviens (le curieux 'My Father The Wolf'), plus porté sur les ambiances sans doute.
L'écoute attentive de ce premier opus dévoile en effet nombre de traits que n'affichent pas les albums du principal port d'attache de ses auteurs, à l'image des lents 'Crazy Heart' et 'Drawning Down The West', sans oublier le terminal 'Farewell To All-in-One', longue dérive aux relents jazzy, cependant qu'affleurent nombre de lignes et détails bizarres voire franchement expérimentaux, témoin l'étrange et déglingué 'Black Hound', que hante un harmonica fantomatique.
Side-project que l'on n'espère pas éphémère, The Exploding Eyes Orchestra se révèle être le complément idéal à Jess And The Ancient Ones, en moins Doom et plus évolutif, signant un premier album aux qualités certaines qui envoûte autant qu'il surprend.