Bien que tous ses efforts, albums longue durée, EP ou DVD , portent tous le même nom, ceux-ci n'ont pas besoin de la date accolée à leur titre pour se distinguer les uns des autres tant Switchblade aime à se reconstruire, à refonder son art au fil du temps, quand bien même sa carrière déjà longue de quinze ans peut être subdivisée en plusieurs cycles.
Ainsi au pur et explosif sludge des débuts a succédé un drone organique et vicié sur la doublette "[2006]" et "[2009]". La très attendue cuvée 2012 des Suédois sera-t-elle du même tonneau que ses deux dernières devancières ? Suggérant, avec ses simples instruments installés en pleine nature, une approche plus rock voire psyché, son - beau - visuel nous livre en vérité un premier élément de réponse.
Moins extrême, encore que ces longs et pétrifiés instants suspendus au-dessus d'un gouffre vertigineux soient toujours de mise ('Movement II'), dans son expression d'un doom pachydermique que ses aînés dont il épouse également l'architecture ternaire, cet essai tente de couler dans le socle granitique habituel des influences années 70 étonnantes qu'incarne un orgue Hammond omniprésent et assuré par Per Wiberg (Spiritual Beggars, Opeth), tapissant les parois de ses plaintes interminables d'effluves liturgiques.
Corollaire de ce patronage, Switchblade tend à se confondre, ou presque, avec le revival seventies très en vogue en Suède actuellement. Presque car Johan Folkesson et Tim Bertilsson n'ont pas sacrifié sur l'autel vintage des Witchcraft et autre Horisont, ce grain charbonneux et cette noirceur minérale qui demeurent leur marque de fabrique. Reste toutefois que jamais la musique des Suédois n'a sonné aussi groovy, aussi sabbathienne aussi ('Movement III') et que, malgré un premier segment en forme de lente montée en puissance et sans doute aucun, le Valhalla de cette écoute, celle-ci ne décolle sinon jamais vraiment.
Loin de la performance d'Eric Danielsson (Watain) sur l'opus de 2006, même les invités tels que Jonas Renkse de Katatonia ou David Johansson de Kongh n'apportent rien ou si peu à cet ensemble techniquement impeccable mais vierge d'émotion et incapable de déclencher des frissons. Ce jugement peut sembler sévère mais on attend mieux sinon davantage de Switchblade que ce disque robuste mais (un peu) paresseux.