"Dans ce monde où nombre d'individus s'arrogent le droit de parler au nom d'un dieu, la voix de
la raison est bien silencieuse face à cette vague de désinformation
médiatique. Les personnes que nous devrions le plus écouter sont
souvent les plus silencieuses." Voici résumé le concept
ambitieux de "Do Nothing Till You Hear From Me",
premier album du trio justement nommé The Mute Gods.
L'essence de The Mute Gods se retrouve dans l'expérience commune de musiciens itinérants : Nick Beggs et Roger King se sont rencontrés alors qu'ils tournaient ensemble avec Steve Hackett. Lors d'un périple sous la bannière de Steven Wilson, Nick Beggs a ensuite rencontré le batteur Marco Minemann, troisième larron de ce combo divin.
Le groupe a choisi d´œuvrer dans un format accessible mais risqué : la pop, marqué sur la plupart des pistes par une assise couplets-refrains tout en conservant des longueurs quasi-progressives. Après une longue introduction pesante aux synthétiseurs couplés à des sons ressemblant à s'y méprendre à des mellotrons, 'Do Nothing Till You Hear From Me' génère tout de suite la sympathie avec sa mélodie chaleureuse. Malheureusement, celle-ci se révèle vite répétitive et donne l'impression que la voix est noyée au milieu d'un flot d'instruments. Idem pour la douce 'Nightschool For Idiots', qui malgré son solo soyeux de guitare, pèche par des longueurs démesurées. En revanche, plus mélodiques, les ballades 'The Last Man On Earth' et la froide 'Father Daughter' apparaissent plus convaincantes.
Le groupe remporte les suffrages lorsqu'il attaque frontalement son sujet. 'Feed The Trolls' apparaît comme un bon compromis entre rock progressif et pop, avec une ambiance pesante et des compositions labyrinthiques. 'Strange Relationship' et 'Swimming Horses' explorent des territoires symphoniques planants. Mais le groupe n'oublie pas de passer à la vitesse supérieure avec des rythmiques plus lourdes et percutantes, des soli de guitare metal jouissifs en cascade sur 'Praying the Mute God', ou avec un chant agressif et un solo de guitare épique sur le cauchemardesque 'Your Dark Ideas', n'hésitant pas aussi à mêler paysages torturés et clavecins ironiques sur 'Mavro Capelo'. L'instrumental 'In The Crosshair' avec ses synthétiseurs imitant les mellotrons réussit une synthèse parfaite entre hard et prog.
Ce premier album porte aux cieux les espoirs de The Mute Gods. Encore timoré voire maladroit en raison de choix contestables (des problèmes de longueur, des répétitions de couplets-refrains), on ne peut qu'augurer une bonne réussite à ce groupe qui a voulu nous ouvrir les yeux sur les problèmes de notre quotidien.