The Tea Club, groupe originaire du New Jersey, fait partie de ces groupes qui commencent à avoir une belle expérience. Formé en 2003, son premier album, "General Winter’s Secret Museum" paraît cinq ans plus tard, puis de deux ans en deux ans paraissent ses successeurs, "Rabbit" (2010) et "Quickly, Quickly, Quickly" (2012). Ralentissant un peu la cadence, il aura fallu attendre la fin 2015 pour entendre ce quatrième opus baptisé "Grappling".
Si la stabilité du line-up n’est pas le fort de The Tea Club (basse, claviers et batterie sont des nouveaux venus), celle des compositions est assurée par les frères McGowan aux commandes depuis l’origine. Encore que stabilité ne soit peut-être pas le terme le mieux approprié, chaque album évoluant par rapport à son prédécesseur tout en conservant une certaine continuité.
"Grappling" reprend donc là où "Quickly, Quickly, Quickly" nous avait laissés. Le groupe n’ayant rien perdu de ses bonnes habitudes nous immerge dans son rock aussi inventif que barré, mélange réjouissant d’airs mélodieux et de saillies surprenantes. La linéarité est un mot désormais banni du vocabulaire des frères McGowan qui multiplient les changements de thèmes, les variations de tempos, les sautes d’intensité tout en conservant une ligne directrice à leurs morceaux, ne tombant jamais dans le piège de l’effet pour l’effet, chaque trouvaille s’imbriquant dans l’ensemble pour créer un surcroît d’émotion.
L’album ne se décrit pas, il s’écoute. Les compositions, travaillées et complexes, insaisissables, sont difficiles à cerner et à apprivoiser. Entre splendides envolées lyriques, brusques poussées de fièvre dissonantes ou arythmiques, la musique passe de moments très dynamiques dominés par une batterie énergique et une basse véloce à des atmosphères plus calmes, sans jamais perdre en intensité. La façon de découper chaque titre en saynètes par une musique très expressive et théâtrale qui raconte à elle seule une histoire, sans qu’il soit forcément utile d’y mettre des mots dessus, fait penser au Genesis de "Foxtrot". Autres influences palpables, les noms de The Flower Kings, Yes, VDGG, Gentle Giant ou King Crimson traversent l’esprit selon les passages. Mais c’est sans conteste à Beardfish, dont il semble avoir hérité du caractère fantasque, que The Tea Club ressemble le plus.
Néanmoins, il s’agit là bien plus de réminiscences que d’une simple copie, les Américains faisant preuve d’une personnalité propre. Ce mélange de caractère, d’originalité et de sens mélodique font de "Grappling" un excellent album dont la complexité pourra cependant décourager les adeptes de néo-prog lisse mais qui devrait parler à tous ceux qui espèrent des surprises d’une musique aventureuse.