Il est étonnant de constater comme les artistes britanniques peuvent faire preuve d'une inspiration débridée. Si Motörhead (RIP) et Saxon sont les meilleurs exemples de cet adage, un autre artiste enchaîne lui aussi les parutions annuelles, mais dans le domaine de l'AOR. Il s'agit de Steve Newman avec son groupe éponyme. Tout comme ses légendaires compatriotes œuvrant sur des terres plus heavy, l'Anglais multicartes s'appuie sur une recette ayant fait ses preuves et ne s'en écarte que rarement pour un résultat sans faute ni surprise qui répond systématiquement aux attentes de sa fan-base. Après un "Under Southern Skies" aussi savoureux que balisé, voici donc que débarque le neuvième opus studio de Newman, intitulé "Siren" et doté d'une superbe pochette.
Pourtant, s'il ne va pas chambouler l'identité construite par le producteur et multi-instrumentiste depuis 1997, "Siren" risque d'en surprendre plus d'un. Avec son riff acéré et sa double pédale, 'Scar Of Love' ouvre les hostilités sur un rythme dont la vélocité était jusque-là inhabituelle et à laquelle il faut rajouter une production plus sèche et cinglante. Voilà de quoi désorienter l'amateur de l'AOR rutilant habituellement proposé par Newman. Pourtant, celui-ci trouvera rapidement de quoi se rassurer par la suite, même si plusieurs autres brûlots s'insèrent dans la tracklist. Alternant les titres plus mélodiques et les accélérations aiguisées, "Siren" se révèle un habile exercice d'équilibriste entre tradition et évolution, avec une tendance globale au renforcement du tempo.
En dehors de l'étincelant mid tempo 'Arcadia' aux accents Leppardiens, et de la jolie ballade 'The Foolish One' portée par le chant habité du maître des lieux, l'énergie prend le plus souvent le pas sur la mélodie. Sans être délaissée, cette dernière n'est clairement plus l'ingrédient principal sur plusieurs titres mordants ('Another Bitch In The Night') ou tranchants ('Some Kind Of Wonderful'). En dehors d'un 'Feel Her Again' au refrain imparable et au solo signé par Robert Sall (Work Of Art, W.E.T), l'AOR laisse plutôt la place à un hard mélodique variant les ambiances. Relativement festif, 'Had Enough' n'est pas sans rappeler le Kiss de l'époque "Crazy Night", alors que d'autres titres offrent une ambiance sombre d'où émergent des refrains plus lumineux ('Siren', 'When It Comes To Love').
Alors qu'il semblait s'assoupir dans le confort d'une formule sans faille et ayant fait ses preuves, Newman prouve qu'il est encore capable de nous étonner en faisant rugir ses cylindres. Basculant vers des territoires plus énergiques sans pour autant abandonner les mélodies, il réussit à évoluer sans se renier, parvenant au passage à offrir quelques refrains accrocheurs qui lui faisaient souvent défaut dans le passé. Voilà un album qui devrait permettre à Newman de franchir un nouvel échelon vers une reconnaissance plus en adéquation avec son incontestable talent.