Coldplay nous revient dix-huit mois après "Ghost Stories" avec son septième, et peut-être dernier, album, "A Head Full Of Dreams". Dernier si l'on interprète les propos de Chris Martin évoquant la fin d'un cycle en comparant ce disque au septième et conclusif tome d'Harry Potter. Mais restons prudents (ou confiants) : dans le monde du showbiz, les adieux définitifs sont aussi fréquents que les comeback retentissants (A-Ha en est un exemple récent). Les Anglais feront sans doute encore parler d'eux.
Si "Ghost Stories" était de nature plutôt intimiste et mélancolique, la rupture de Chris Martin et de Gwyneth Paltrow aidant, "A Head Full Of Dreams" se veut plus dynamique et optimiste, en filiation avec 'A Sky Full Of Stars', seul morceau de l'album précédent qui déparait un ensemble en teintes sombres et dont le titre fait écho, probablement pas par hasard, à celui de ce nouveau disque. Ceux qui s'étaient réjouis d'un retour aux ballades mélancoliques d'antan risquent fort d'être un peu désappointés à l'écoute de ce nouvel opus.
Le ton est donné d'entrée avec l'ouverture éponyme au tempo enlevé et à la rythmique funk. Basse et batterie délivrent un son rebondi, accompagnées de nappes de synthés et guitares rythmiques et d'un chant pas trop mélancolique. On sent le titre pop FM conçu et taillé pour faire un tube radiophonique, suffisamment "carré" pour être entraînant mais non dépourvu de subtilité (par exemple ces circonvolutions de synthés qui évoquent des cris d'oiseaux sur un bord de mer lors du second couplet).
Malheureusement, ces subtilités font défaut à d'autres titres qui séduiront probablement plus les habitués de dancefloors que ceux qui se délectent du charme de mélodies ciselées qui ne se dévoilent pudiquement qu'au bout de nombreuses écoutes. 'Hymn For the Weekend', 'Adventure Of a Lifetime', 'Army Of One' et dans une moindre mesure 'Up & Up' n'ont probablement pas d'autre prétention supposée que de faire bouger les pieds, les mains et la tête de l'auditeur en cadence. Disco ou R'n'B, ils ont tout pour séduire les amateurs de Beyoncé (d'ailleurs invitée sur un titre) ou Maroon 5, la production du duo norvégien Stargate, spécialiste hip-hop/R'n'B (Beyoncé, Rihanna, Jennifer Lopez, Mariah Carey, Janet Jackson, …), n'y étant certainement pas pour rien.
Aux côtés de ces titres "typés" que chacun appréciera selon ses goûts, d'autres se révèlent sans saveur. Ainsi, il y a fort à parier que 'Birds' ou 'Colour Spectrum' ne laisseront à personne un souvenir inoubliable. Mais Coldplay est un groupe éclectique et le prouve une nouvelle fois. A commencer avec l'inclassable 'Kaleidoscope', court et curieux intermède combinant la lecture d'un poème ('The Guest House') sur arpèges de piano classiques et le sample d'Amazing Grace chanté par le président des Etats-Unis himself. Un titre dont la gravité est bien éloignée du côté funk dansant des titres précités.
'Everglow' et 'Amazing Day' sont deux ballades mélancoliques, pop léchée sans surprise mais de bonne facture, la première évoquant U2 et Peter Gabriel, la seconde Keane. Quant à 'Fun', ne vous fiez pas à son titre, cette bluette mélancolique façon Daniel Powter renoue pleinement avec le style Coldplay des premiers albums. Simple, directe, mais avec le petit plus qui fait qu'on prend un véritable plaisir à la fredonner, subtile et pleine de charme, une chanson qui s'affirme comme un hit en puissance.
Pourquoi demander à Coldplay plus qu'il n'a envie de donner ? Cela fait déjà longtemps qu'il a délaissé le rock alternatif pour une pop/rock plus mainstream, courant dans lequel baigne un "A Head Full Of Dreams", certes simple et sans surprise, mais bien fait et qui se laisse écouter agréablement.