La fin de l'année 2015 est propice aux vieilles bandes ressorties du fin fond d'un placard pour servir de cadeau de Noël aux mélomanes nostalgiques. Ainsi, aux côtés d'un Keith Emerson Trio exhumant le premier disque enregistré de Keith Emerson et du double album "Live Via Satellite" ressuscitant deux concerts "oubliés" de John Wetton au tournant du siècle, c'est un autre de leurs compères, Greg Lake, qui, en compagnie de Geoff Downes, nous propose un court album d'une demi-heure enregistré à la fin des années 80 et resté au stade de démo pendant 35 ans.
Quand le chanteur-bassiste de King Crimson et d'ELP rencontre le claviériste d'Asia, de Yes ("Drama"), et accessoirement des Buggles, on est en droit d'espérer un résultat haut en couleurs. Malheureusement, le duo vient nous apporter la preuve que l'addition de talents confirmés ne suffit pas à faire un bon disque et que, si ces démos étaient restées enfouies pendant toutes ces années, c'est qu'il y avait peut-être une bonne raison.
Il n'y a certes rien de désagréable dans ces six titres (le septième étant une version alternative à l'un des morceaux, histoire d'allonger la sauce) dont la plupart ne sont d'ailleurs pas aussi inédits qu'ils en ont l'air. 'Money Talks' figure sur la compilation de Greg Lake "From The Beginning" alors que 'Check It Out' et 'Blue Light' sont repris sur une autre compilation du guitariste, "From The Underground 2". 'Affairs Of The Heart' a carrément l'honneur d'être paru sur un disque d'ELP, même si c'est loin d'être le meilleur, "Black Moon". Quant à 'Love Under Fire', il semblerait qu'il tienne lieu de tube puisque, outre le fait qu'il figure sur l'album en deux versions, il a déjà eu l'honneur d'appartenir aux deux compilations précitées de Greg Lake ainsi qu'à "Aqua", quatrième album d'Asia. Finalement, seul 'Street War' peut revendiquer le label d'inédit (à ne pas confondre avec le 'Street War' paru dans "The Hot Seat" d'ELP).
Mais l'intérêt suscité par ces rocks mid-tempo est bien faible. Les mélodies offrent peu d'attraits, stéréotypées et dépourvues d'envolées lyriques ou de décharges d'adrénaline. Les claviers 80's dégoulinent de notes superflues et d'effets kitsch, la batterie mixée en avant est peu imaginative et le chant reste sans âme malgré les bonnes intentions de Greg Lake. Disons-le crûment : l'inspiration est à la rue et les efforts du trio pour rendre le tout digeste semblent bien poussifs.
S'il fallait retenir quelque chose de ce disque très moyen, on pourrait citer 'Love Under Fire' à la mélodie plus addictive (elle n'a pas de mal) et présentant notamment un premier couplet au petit côté oriental sympathique et d'une plus grande finesse que le reste, ou encore 'Affairs Of The Heart'. Ce n'est pas un hasard si ces deux titres ont été retenus l'un par Asia, l'autre par ELP.
Mais c'est bien connu, au royaume des aveugles, les borgnes sont rois et cela ne suffit pas à justifier l'achat de cet album. Court, daté, manquant de finesse et d'idées musicales, "Ride The Tiger" aurait pu rester au fond d'un placard sans vraiment manquer à personne.