Trois années se sont écoulées depuis la parution de "Somewhere in Afrika", délai jusqu'alors inédit dans la fréquence de parution des albums du Manfred Mann's Earth Band. Ce douzième album studio voit le retour aux affaires du guitariste historique du groupe, Mick Rogers, et l'arrivée d'un nouveau bassiste, tandis que Chris Thompson continue d'assurer le job derrière le micro.
Mais ce nouvel album voit surtout le groupe se retrouver de plain-pied dans les fameuses années 80, décennie qui aura porté aux nues le Top 50 en France, la new-wave un peu partout ailleurs, et surtout les synthétiseurs prendre de plus en plus d'importance dans l'espace sonore.
Et malgré son énorme background, MMEB n'échappe pas à cette mode, proposant sur "Criminal Tango" un son complètement chamboulé. Hormis quelques notes dans une partie instrumentale sans intérêt de 'Killer on the Loose', le mini-Moog de Manfred Mann disparaît du paysage au profit de sonorités de claviers synthétiques. De même, les guitares sonnent comme du Duran Duran, la basse claque dans les aigus comme dans les groupes de funk en vogue de l'époque.
Bien que s'agissant encore une fois majoritairement de reprises, les compositions simplistes présentent un caractère faussement agressif, formatées pour du passage radio. Quant aux passages instrumentaux qui faisaient la force et l'originalité du groupe, ils versent désormais dans la caricature du passage obligé sans présenter un quelconque intérêt, le summum étant atteint en l'occurrence sur l'instrumental 'Crossfire' qui, durant près de quatre minutes, va tourner en rond avec des gimmicks d'une indigence rare.
Les amateurs de Duran Duran trouveront peut-être un intérêt à un titre comme 'You Get Me Right Through The Heart' (reprise de Robert Byrne – artiste de country), les fans d'Inxs pourront éventuellement apprécier 'Bulldog' (reprise de 'Hey Bulldog' des Beatles !). Quant aux autres, que ce soient les amateurs d'une pop/rock bien léchée, ou tout simplement ceux qui appréciaient chez MMEB le savoureux mélange des genres teinté de progressif, il leur restera l'intéressante mais inutilement allongée reprise de Joni Mitchell ('Banquet') pour se consoler d'un album dont il est fort à parier qu'il ne dépassera guère une voire deux écoutes avant de retourner sagement prendre la poussière sur une étagère.