Si l'on excepte la parenthèse "Plains Music" publiée sous le seul nom de son géniteur, près de 10 années se sont écoulées depuis la sortie de "Masque", précédent album studio du Manfred Mann's Earth Band, avant que ne soit publié "Soft Vengeance", qui sera d'ailleurs la seule publication de la décennie pour le groupe, et la dernière sous ce seul vocable ('2006' étant libellé Manfred Mann with MMEB).
Après une telle attente, et un véritable changement d'époque entre les années 80 et 90, à quoi pouvaient donc s'attendre les fans du groupe ? Des reprises, encore des reprises et toujours des reprises : bien dans la tradition du groupe, cette galette ne propose qu'un seul titre (sur 14) crédité au seul Manfred Mann, tous les autres étant des adaptations allant des Rolling Stones à Bob Dylan, en passant par Anthony Moore (qui a collaboré notamment avec Pink Floyd) ou d'autres plus obscurs comme Dannie Bryant (attention, l'orthographe est importante !)
Avec 'Pleasure and Pain', l'entame se révèle somptueuse. Développant une ambiance rappelant 'Spirits in the Night' et montant tranquillement en puissance, ce titre développe une pop majestueuse sublimée par des accompagnements symphoniques de toute beauté, la patte du maestro des claviers étant bien présente. La suite va malheureusement se révéler plus quelconque, avec une collection de morceaux qui ne parviennent guère à retenir l'attention, titres bien policés à la production impeccable mais auxquels il manque tout simplement un peu du sel et du grain de folie qui a fait la grandeur de MMEB sur ses productions passées. Que ce soit 'The Price I Pay', 'Shelter for the Storm' ou pire encore la fade reprise des Stones 'Play with Fire', tout semble édulcoré, justifiant le premier adjectif du titre de l'album, mais en ayant oublié le nom qui lui est accolé.
Restent toutefois quelques plages notables, au premier rang desquelles on retiendra 'The Complete History of Sexual Jealousy' et ses chœurs pompeux, mais une nouvelle fois gâché par un fade-out abrupt. On trouvera également quelque intérêt au curieux mélange entre le Moog traditionnel de Manfred Mann appuyé par une basse ronflante et le chant féminin disco-funk de '99lb'. Seul autre titre véritablement en phase avec le passé glorieux du groupe, 'Miss You' nous délivre enfin un rock rythmé avec une basse omniprésente, ponctué par de superbes soli de guitare et de Moog. Quant à l'unique morceau crédité à Manfred Mann, 'Adults Only', il s'agit d'un instrumental dans lequel il s'offre une nouvelle plage de Moog en solo, mais qui finit par tourner rapidement en rond, limitant là encore son intérêt.
Album de fin de règne, "Soft Vengeance" propose quelques réminiscences du passé le plus glorieux du groupe, malheureusement accompagnées de titres beaucoup plus quelconques qui, sans rendre l'album indigeste, en limitent toutefois l'intérêt.