Cela faisait un petit moment que nous n’avions pas de nouvelles de Spyros Charmanis, compositeur et multi-instrumentiste grec déjà auteur de deux albums. "Than The Common Plague" vient combler cette lacune même si, pour l’occasion, il cache son identité derrière un nom d’emprunt, None Other, seul à apparaître au recto de la pochette.
Si le nom change, le style, lui, reste peu ou prou le même. Attaché aux albums portant un concept, celui-ci traite de la maladie, des soins qu’on y apporte et de l’isolement que l’on ressent, d’après une expérience vaguement autobiographique. Le tout accompagné d’un livret d’une trentaine de pages reprenant l’histoire sous forme de nouvelle. Spyros Charmanis fait tout ou presque, invitant une poignée d’artistes à poser quelques lignes de chant ou trois notes de violoncelle ou de bouzouki le temps d’un titre. Musicalement, on retrouve le progressif atmosphérique dans lequel le compositeur semble se trouver à l’aise, zébré de brusques moments de fureur vite dominée.
Continuité donc, mais Spyros Charmanis peaufine son style d’album en album. Les passages atmosphériques sont plus denses, les changements de rythmes bénéficient de transitions plus fluides ou s’intègrent mieux dans le paysage sonore. L’imagination du Grec fourmille toujours autant d’idées mais celles-ci sont mieux canalisées, les nombreux samples sont mieux utilisés, l’énergie parfois brouillonne reprochée sur les deux premiers albums se trouve canalisée.
Cela ne veut pas dire pour autant que l’album ne souffre d’aucun défaut. La musique, sombre, installe des ambiances certes réussies mais non exemptes d’une certaine linéarité dans la manière de procéder. Sur la plupart des titres, de brusques poussées de violence viennent interrompre un début d’une douceur trompeuse puis la mélodie s’évanouit dans des sons confidentiels. Le chant n’est souvent que murmure, les thèmes fédérateurs sont trop courts pour qu’on s’y attache et les bonnes idées et les passages intéressants se retrouvent un peu dilués. Seuls échappent à ce schéma l’introductif ‘The Beast Is Yet To Come’, rétro et en décalage de ce qui va suivre, l’impressionniste et classique ‘Dread In The Water’ et ‘No Decorum’ sur lequel un chant presque lyrique accompagne un violoncelle très sombre dans une mélodie enfin identifiable sur la durée.
"Than The Common Plague" aurait pu être un album de Roger Waters ou du Floyd de la période "The Wall" (ce qui revient au même, me direz-vous). Un disque à prendre comme un tout, qui raconte une histoire torturée dont il faut s’imprégner sous peine de rester sur le bord du chemin en se disant qu’il y a de belles choses mais que c’est trop diffus.