Après avoir sorti deux albums en 2014 ("Songs of Seas and Oceans" et "From Middle to East") plutôt appréciés par la rédaction de Music Waves, le Néerlandais Sebas Honing revient avec ce qui est déjà son cinquième album au compteur. Si comme à son habitude ce musicien multi-instrumentiste s’occupe de toutes les partitions, il laisse cependant pour la première fois la batterie à un "vrai" batteur, Christiaan Bruin (Sky Architect).
Est-ce la présence de ce dernier qui lui donne des ailes ou l’envie de renouer avec le style de son précédent groupe, Equisa, toujours est-il que "The Big Shift" marque effectivement une évolution nette par rapport aux deux albums précités. Si ceux-ci s’adressaient plutôt à un public amateur de progressif mélodieux s’aventurant parfois en terres atmosphériques, ce nouvel opus se veut résolument plus direct et vigoureux. Direct au point qu’on peut se demander si le terme progressif peut encore lui convenir, vigoureux à ratisser du côté des métalleux, hard rockers et autres heavy addicts.
Car, à tout prendre, les quinze titres de ce (trop) plantureux disque adoptent le plus souvent le format archi-classique couplet/refrain de simples chansons. Le chant est d’ailleurs très présent tout du long, ne laissant à la guitare que le traditionnel pont pour s’exprimer dans des solos plus enlevés les uns que les autres. Les claviers sont quant à eux quasiment inexistants, n’ayant la faveur du devant de la scène que le temps de quelques mesures au début de ‘Homeless’.
Quinze titres donc qui alternent moments de fausse douceur (chant mezzo voce, balayages de guitare acoustique) et de vraie fureur (riffs épais et solos vifs des guitares, double pédale chère au monde du metal), avec une balance penchant nettement en faveur des rythmes rapides et des mélodies heavy (‘Ditching Fear’, ‘Mercury Retrograde’, ‘OMG’, ‘Homeless’, ‘Falling Down’, ‘Life, Part II’, ‘Lost’) au détriment des ballades (‘Life, Part I’, ‘All You Are’, ‘Mild Smile’, ‘Flickering Heart’). Entre les deux, ‘Freedom’ et ‘Hometown’ promènent leurs faux-airs de chansons pop, le second ressemblant à s’y méprendre à un titre de Coldplay millésimé 2016.
Si ce retour à une certaine simplicité/simplification bourrée d’énergie n’a rien de préjudiciable en soi, il n’évite pas certaines maladresses comme ce curieux et prématuré fade out sur ‘Mercury Retorgrade’, donnant une impression de mal fini, les beuglements énervants du refrain de ‘OMG’ ou les dispensables ‘Full 180’ et ‘Life, Part II’ qui sentent le remplissage à plein nez. Défauts que font oublier les belles envolées de guitare, le jeu énergique de la batterie et des mélodies peu complexes mais sympathiques.
"The Big Shift" risque fort de surprendre, et de désappointer, ceux qui avaient été séduits par les deux albums de 2014. En simplifiant et durcissant son jeu, Sebas Honing cherche probablement à élargir son public. L’avenir dira s’il a fait le bon choix.