Après deux EP (en 2011 et 2012) dont certains titres se retrouvent ici, Black Magic Fools sort enfin son premier long album. Black Magic Fools, pour ceux qui traînent au fond de la classe, c'est un combo de medieval folk metal comptant en son sein violons, flûtes et cornemuse, et venu tout droit de Suède mais à une époque lointaine et sombre, horrifique presque dans le texte.
La première partie de "Soul Collector" raconte une seule et même histoire, reprenant la trame du précédent album, "A Jester's Confession" : un musicien voit son instrument détruit avec des crucifix par un groupe de villageois. Pour le récupérer, il pactise avec le diable et revient répandre la pourriture et la mort sur son passage, collectant les âmes pour nourrir les enfers. Ca fiche les jetons !
C'est à 'Fools Parade' de poser le cadre et l'ambiance de cette sinistre farce dans laquelle cornemuse et violon s'enchevêtrent dans une danse plus médiévale que macabre. Puis, sur cette même mélodie, 'Grave Dancer' lance les hostilités. 'Black Jig' et sa longue partie instrumentale folk et sombre à la Maiden ou 'Lies', théâtre de saillies guitaristiques impressionnantes, seront des moments fort attendus de l'album et suffisamment crédibles pour ancrer le nom de Black Magic Fools définitivement dans votre liste des groupes à suivre, du moins pour ceux qui adhéreront au travail vocal.
Car très vite, on comprend que le seul obstacle éventuel pour apprécier cet album pourrait être la voix du chanteur. La musique, très médiévale, dans des atours souvent celtiques, et plombée d'un gros travail métallisant de la section basse/batterie, se veut fort charmante et riche en images. Percée ici et là de soli de guitare furieux (celui de 'Salvation' parmi d'autres) et toujours à propos, souvent lourde et inspirée, garnie de breaks épiques, elle possède une réelle personnalité. Par contre, la voix de Pontus Nilsson, pas toujours bien mise en valeur dans ce mixage très brut et cru (les violons sont bien mieux traités), pourrait rebuter certains puristes. Manquant encore de finesse, d'une touche de théâtralité, d'accent anglais et de la puissance nécessaire pour ne plus avoir mal pour lui quand il pousse le son, elle nécessite un petit temps d'adaptation que vient faciliter la trame musicale.
'Last Supper' termine cette petite histoire qui comble déjà la moitié de l'album. Riche en parties instrumentales médiévales irrésistibles, il possède une puissance narratrice plus que louable. La seconde partie du disque débute par 'Soul Collector' dont le riff classique vous rappellera une vingtaine de formations différentes (de Sabbath à Audrey Horne en passant par Amon Amarth et Megadeth) tout en évitant l'écueil du plagiat. Suivent deux anciens titres du groupe, légèrement réarrangés, 'A Jester's Confession', plus rock que metal auquel se mêlent des influences folk, et l'excellent 'Dansa I Natt' qui débute en acoustique pour mieux lancer sa gigue infernale. 'Not My Truth' résume à lui seul l'univers de la formation qui, entre poussées métalliques lourdes et finesse folk dansante, joue avec notre propre dualité intérieure pour un résultat fort intéressant. Le dernier titre, chanté par une voix féminine envoûtante qu'on voudrait entendre plus souvent à l'avenir dans les albums de la formation, vient clore le disque sans que la moindre impression de lassitude ou de gène ne vienne poindre.
Bon, il reste une marge de progression pour faire de Black Magic Fools une valeur sûre du metal mais les principaux éléments de la réussite à venir sont présents. Ne manque à ce jour que la chance, le coup de pouce nécessaire, l'alignement attendu des étoiles qui fera passer le groupe de l'ombre à la lumière, du clin d'œil à la mémoire.