"Hail The Apocalypse" nous avait laissés dans une grande expectative tant le son d'Avatar s'y était affirmé, montrant une identité forte et établie. Avec La puissance du titre éponyme, 'Murderer' ou encore le côté psychédélique d'un 'What I Don't Know', Avatar invitait à penser que le groupe pouvait facilement confirmer son assise dans le paysage death mondial. "Feathers & Flesh" arrive à point nommé pour le vérifier.
Le clown psychopathe sorti tout droit du Carnaval de l'horreur dans le précédent opus s'est tout simplement échappé de son univers pour venir se hisser dans votre chambre au pied de votre lit et se fait le narrateur d'une aventure extraordinaire. Telle une fable sortie de l'œuvre de La Fontaine, le concept autour duquel s'articulent les quinze titres de l'album va vous faire voyager en compagnie d'un hibou, obstiné dans le combat vain d'empêcher le soleil de se lever, voulant régner seul en Maître de la nuit. Il rencontrera tout au long de son voyage d'autres animaux qui essayeront de le raisonner, diffusant çà et là des messages forts de sens, invitant alors l'auditeur à réfléchir aux véritables combats à mener. Mais la lutte et l'entêtement du rapace lui seront fatals.
Si le thème et les personnages choisis sont discutables, il reste évident que l'univers, lui, est parfaitement planté. La réalisation est suffisamment fine pour éviter les bruits d'animaux, et la lutte effrénée du rapace est parfaitement mise en musique dès le deuxième titre ‘House Of Eternal Hunt’. La double grosse caisse y est délicieuse, rapide et dévastatrice, et les soli arborent des airs conquérants. La voix de Johannes se fait puissante dans les parties sursaturées et mélodieuses. Pas de meilleure entame possible, le fan du précédent album retrouve ses marques.
À mesure que les titres avancent, on sent l'atmosphère se faire plus dense, à l'image de 'The Eagle Has Landed', et les inspirations empruntées à un System Of A Down se retrouvent. 'New Land' en est un bon exemple, un des meilleurs titres de cet opus, où le travail du vocaliste est extrêmement élaboré et varié, alternant sur une mélodie entêtante un chant parfois presque guttural, des ponts où il se fait parfaitement clair, presque mis à nu, d'autres où il se fait murmure. La mélodie s'enrichissant tout au long de la chanson, on traversera des back vocaux chargés d'émotion, presque religieux.
Ensuite, une autoroute se déroule, où les titres de très bonne facture s'enchaînent, mais c'est environ à mi-course qu'on va tomber sur des refrains un peu poussifs, ou des atmosphères légèrement longues (comme sur 'Pray The Sun Away') heureusement toujours entrecoupées de refrains efficaces et salvateurs. Peut-être l'œuvre est-elle trop riche pour être appréciée et surtout comprise lors des premières écoutes, et faudra-t-il prendre le temps d'apprivoiser l'animal ?
Pour preuve, le groupe réalise que l'univers est trop dense pour être idéalement retranscrit dans un booklet classique, et une version de l'album est accompagnée d'un livre complet permettant de mieux comprendre l'œuvre dans son intégralité. Produit par Sylvia Massy, connue pour ses travaux avec System Of A Down, Tool, Red Hot Chili Peppers, l'album a su condenser les recettes efficaces qui font le succès d'Avatar.
Cependant, force est de constater que si l'album avait été de qualité constante tout au long des quinze titres, et surtout à l'image de la première moitié, nous aurions franchement hésité dans sa notation entre 4 et 5. Si les meilleurs titres sont réellement excellents et qu’on en redemande, la seconde partie est clairement en-dessous, agissant négativement dans l'appréciation globale de la galette. Sans aucun doute, Johannes et ses comparses savent composer de véritables chefs-d'œuvre, mais reste à sortir l'album parfait, ce que ce "Feathers & Flesh" n'est pas encore...