Nous avions quitté Dead Letter Circus sur "The Catalyst Fire", un deuxième album confirmant les qualités entendues dans "This Is The Warning", à défaut de les transcender. Cet album sorti en 2013 a été un tel succès que le quintet emmené par le chanteur Kim Benzie en a gravé un témoignage supplémentaire l'année d'après à l'occasion d'un EP acoustique. C'est donc un groupe très en verve et sûr de son inspiration qui revient pour son troisième album.
Le début d'"Aesthesis" est plutôt réussi et démontre clairement que les Australiens ont composé dans l'énergie sans s'encombrer du superflu. Avec son tiercé inaugural, Dead Letter Circus s'assure de toucher le plus grand nombre (le single idéal 'While You Wait') avec des rythmiques percutantes ('In Plain Sight'), des mélodies accrocheuses et des refrains particulièrement efficaces ('The Burning Numbers'). A côté de cela, le groupe s'est largement allégé de toute l'armature technique audible dans le premier album, accentuant la voie empruntée dès "The Catalyst Fire".
Jusqu'à cet album, la composition musicale de Dead Letter Circus précédait l'écriture des paroles. Avec "Aesthesis", le groupe innove en inversant la démarche. En procédant ainsi il reconfigure son propos et accentue le soin porté aux intonations vocales, au détriment de l'exigence harmonique instrumentale. En ce sens, la succession de mid-tempi et de ballades qui débute par 'Show Me' et se termine par 'The Lie We live' mise plus sur les ambiances et les performances de Kim Benzie, qui gagnent en sensibilité ('Silence'). On retrouvera quelques passages plus dynamiques sur la fin du disque ('Change The Concept' ou 'X'), mais ces morceaux n'ont ni l'énergie ni la variété pour emporter une totale adhésion.
Avec "Aesthesis", Dead Letter Circus poursuit un cheminement qui tend vers le normatif. Les compositions se structurent selon un schéma standardisé qui ne laisse plus beaucoup de place à l'inventivité, tant dans l'approche technique que dans la précision mélodique. Le résultat est un album de rock alternatif moderne aux sonorités électroniques judicieusement intégrées qui s'écoute très bien, mais qui perd un peu de son intérêt à chaque nouvelle écoute. Certains diront que Dead Letter Circus a succombé aux sirènes de la facilité commerciale avec cet album qui joue la carte de l'accroche. Le vrai regret demeure dans la frustration devant le potentiel du groupe, jamais totalement exploité, à combiner de manière originale et équilibrée le prog et l'alternatif.