On savait que High Priest Of Saturn deviendrait grand, plus grand encore qu'il ne l'était pourtant déjà quand il gravait, il y a maintenant trois ans, un premier opus éponyme de très bonne mémoire. On sentait alors que le potentiel des Norvégiens n'avait encore été qu'à peine défloré. Du moins, l'espérions-nous. "Son Of Earth And Sky" confirme aujourd'hui ce sentiment.
Pour ceux qui ont raté l'épisode précédent, sachez que le groupe évolue dans une veine doom stoner tavelée d'enluminures psychédéliques que sublime un chant féminin, celui de Merethe Heggset, aussi séduisant que sentencieux, atout de charme qui n'est pourtant pas la seule clé de voûte de l'édifice, laissant la part belle à des claviers omniprésents qui tapissent cet antre mystérieux d'une beauté lunaire de tentures duveteuses.
Cette seconde offrande laisse d'ailleurs à cet orgue volubile tout l'espace pour s'exprimer, comme l'illustre en guise d'ouverture le monumental 'Aeolian Dunes', véritable voyage galactique qu'il propulse vers des sphères célestes inconnues, avec ses effluves enveloppantes et tentaculaires que soulignent des guitares au lourd fuselage, périple long de plus de dix minutes au compteur qui d'entrée de jeu place la barre très haut et justifie à lui seul l'impérieuse acquisition de "Son Of Earth And Sky" dont le reste du programme, quoique moins puissamment évocateur, n'en demeure pas moins digne d'éloge.
A commencer par 'Ages Move The Earth' qui déroule la trame tranquille d'un art cosmique, désormais moins doom sans doute mais si ce n'est plus beau encore. Car High Priest Of Saturn possède une manière bien à lui de tricoter des instants comme suspendus dans le temps, presque irréels. Plus que pétrifié, le rythme, sauf lors des ultimes mesures de 'The Warming Moon" où il s'emballe en une accélération surprenante, semble endormi, bercé par les mélopées d'une chanteuse aux allures de prêtresse.
Parfois appuyées, les guitares décollent le plus souvent très haut ('The Flood Of Waters'), rampes de lancement stratosphériques qui n'est pas sans évoquer le Pink Floyd le plus planant, témoin la piste éponyme à l'ambiance feutrée où six-cordes et claviers stellaires fusionnent en un magma bourgeonnant de notes qui résonnent comme un ressac soyeux.
Avec "Son Of Earth And Sky", les Norvégiens franchissent un palier, accouchant d'un très grand disque où les influences progressives font plus qu'affleurer à la surface de leur doom cosmique.