Groupe hollandais dont l'histoire est marquée par de très nombreux changements de personnel, Cirrha Niva publie son quatrième album. L'ambition affichée de "Out Of The Freakshow" est de proposer une musique progressive et théâtrale aux émotions variées. Le "Freakshow" est l'exposition d'êtres humains considérés comme
difformes ou en tout cas hors normes (femme à barbe, Elephant Man,
nains...) dans le but de choquer et de susciter les plus vils sentiments
humains. Influencés par Dream Theater, Nevermore, Psychotic Waltz mais aussi du hard rock plus classique, les Bataves ont pour objectif de surpasser un "For Moments Never Done", paru en 2009, déjà bien apprécié.
Pour ce nouvel opus, Cirrha Niva prend le pari de laisser libre cours à la créativité et à une certaine outrance qui n'est pas sans rappeler certains albums d'Evil Masaquerade, et assume une exubérance dans l'expression. Ainsi 'I Guess' débute avec une invitation sur le mode du spectacle avant de développer une atmosphère lourde qui évoque le regretté groupe allemand Superior, le chant renforçant largement cette impression. Mais la force de ce groupe reste sa personnalité assez remarquable qui emprunte effectivement à Psychotic Waltz dans certains passages de 'From Ego' notamment, mais aussi à tant d'autres artistes que finalement, il s'agit là d'un groupe possédant un caractère qui lui est propre. L'aisance des musiciens leur permet de jouer dans tous les registres avec ce soupçon persistant de légère décadence.
Le chant de Legrand est démonstratif et théâtral à souhait. Il contribue à placer l'auditeur dans cette ambiance un peu malsaine, dans laquelle les émotions sont surjouées, surtout si elles sont pernicieuses. L'ambition étant de révéler les monstres que chaque être humain camoufle en lui. Legrand et les chanteurs invités que sont Devon Graves (Psychotic Waltz, Dead Soul Tribe), Lisette Van Den Berg (Scarlet Stories, Karmaflow) expriment cette part sombre au travers de ce chant emphatique qui se pose parfois pour accompagner les accalmies instrumentales. Car, la voix n'est pas la seule à exprimer cette outrance. En effet, les guitares sont alternativement virevoltantes, sages, agressives ('Time'), planantes ('Reprise Of A Beautiful Day') mais toujours en action, soutenues brillamment par la basse très présente de Michael Steenbekkers et la batterie variée de Nathanael Taekema. Notons la flûte de Devon Graves sur 'Just Another Legacy', titre éminemment progressif et entraînant bien qu'un peu long et répétitif sur la fin.
C'est une œuvre remarquable et très personnelle que propose Cirrha Niva avec ce spectaculaire défilé des horreurs dans lequel la colère côtoie l'abjection mais aussi une expression plaintive. C'est une musique qui coïncide pleinement avec l'adjectif progressif qui laisse entendre une grande liberté d'expression. Il en faut peu pour se laisser entraîner dans ce déluge bien ficelé et attachant.