Troisième volet d'une trilogie comprenant "Journey's End" (2010) et "Invicta" (2012), "Dust" marque également d'une pierre blanche la carrière de Robert John Godfrey puisque celui-ci a annoncé à cette occasion et pour cause d'Alzheimer évolutif sa mise en retrait du groupe qu'il a fondé et porté à bout de bras depuis plus de 40 ans.
Chantre du progressif symphonique, et ici ce terme est à prendre au premier degré, The Enid ne déroge pas à sa vocation première. L'introduction de 'Born in the Fire' va déployer une ambiance sombre et martiale, avec des chœurs évoquant l'album "Mythodea" de Vangelis. Le propos va très rapidement prendre une tournure symphonique, les claviers de Mr Godfrey samplant tout un orchestre, percussions comprises, avec moult saillies de cuivres percutant les tympans comme autant de flèches acérées.
Les différentes plages sont construites comme autant de mouvements d'une même symphonie. Les sonorités orchestrales sont majoritaires, reléguant les instruments électriques au second plan, sauf quand ceux-ci disposent de cours instants leur étant entièrement dédiés. Paradoxalement, ce sont ces rares moments de rock au milieu d'une musique classisante qui vont s'avérer les plus intéressants.
Car pour le reste, malgré une qualité de réalisation plutôt intéressante s'agissant de samples d'un orchestre symphonique (quoique j'aurais préféré pour ma part un véritable orchestre), le propos va s'avérer très rapidement ennuyant quand il n'en devient pas irritant.
Au premier rang des accusés, Joe Payne, chanteur à la voix incroyable et présentant une tessiture peu commune. Malheureusement, son chant expressif et plein d'emphase devient rapidement ampoulé et prétentieux, desservi de surcroît par des mélodies qui font ressembler l'ensemble à une comédie musicale. Certes des passages plus intimistes façon poèmes symphoniques permettent de constater qu'il est capable de retenue et d'émotion ('Monsters' et 'When the World is Full'), mais dans ces cas-là, ce sont les titres eux-mêmes qui manquent d'intérêt. Et pour couronner le tout, ces lignes de chant sont la plupart du temps soutenues à l'identique par le piano, la guitare ou les cordes de l'orchestre virtuel. A se demander finalement si une production 100% instrumentale n'aurait pas eu plus d'intérêt ?
Habituellement fructueux, le mélange des univers rock et classique est ici inopérant. La faute non pas à des antagonismes mal maîtrisés, mais tout simplement à une écriture et une restitution certes de qualité, mais n'engendrant pas de réel intérêt en dépit d'une longueur de galette somme toute très courte. Décevant.