Periphery est une des formations de metal progressif djent les plus intéressantes par sa capacité à faire évoluer sa musique au fil des albums. Jamais prisonnier d'un genre qui commence à tourner en rond, le sextet du Maryland nous avait régalés avec son ambitieux concept "Juggernaut" dans lequel il redéfinissait une fois de plus son metal tout en conservant la signature technique et mélodique qui est la sienne. Alors que nous ne pensions pas entendre Periphery de sitôt après la double sortie de son maître album, le groupe refait surface avec son quatrième album "Periphery III : Select Difficulty".
Aborder un nouvel album des Américains s'accompagne toujours d'une agréable curiosité à laquelle se mêle l'attente d'être une fois de plus bousculé. C'est clairement ce que le premier titre 'The Price Is Wrong' offre avec une déferlante colérique d'une densité impressionnante déversée par un groupe d'une habileté technique époustouflante. Peu de mélodie dans ce morceau dont les préoccupations sont ailleurs. Cette mise en bouche est déstabilisante et peut inquiéter les amateurs de mélodie sur l'orientation de "Select Difficulty". 'Motormouth' appuie cette première impression mais au fil de son déroulement on perçoit comme une inclinaison. Les mélodies gagnent en force et en franchise quand le chant clair fait enfin son entrée sur la deuxième moitié du titre. En deux morceaux la bande à Misha Mansoor condense ce que le groupe compose de plus violent pour ne plus y revenir par la suite, et par la même occasion maintient quelques minutes le suspense sur le contenu à venir.
De 'Marigold' à 'Lune', c'est un Periphery ultra mélodique qui s'affiche dans une kyrielle de refrains entêtants à dominante de chants clairs et un fin dosage d'arrangements electro et symphoniques ('Marigold', 'Habitual Line Stepper'). Ces orchestrations, principale innovation de Periphery dans cet album, sont plutôt discrètes et disséminées, parfois de manière originale en toute fin de titre comme dans 'Marigold' que n'aurait pas renié Coheed & Cambria, 'Habitual Line Stepper' ou 'Absolomb', et permettent de densifier les atmosphères, particulièrement marquantes dans le mid-tempo final tout en crescendo 'Lune' ou le townsendien 'Remain Indoors'. Les quelques accélérations rythmiques et autres détours furtifs à plus de nervosités et frénésies djent ('The Way The News Goes', 'Flatline', 'Prayer Position' et 'Habitual Line Stepper' avec son refrain à la Soilwork) vont à peine égratigner la solidité d'un metal alternatif et progressif moderne axé sur le contraste des intensités ('Lune'), l'efficacité harmonique ('Flatline' et le très immédiat 'Catch Fire' qui rappelle Linkin Park), la puissance ('Prayer Position') et le groove ('The Price Is Wrong').
Comme son intitulé le laisse à penser, ce "Periphery III : Select Difficulty", de par ses orientations mélodiques et ses formats maîtrisés, est à mettre plus en rapport avec "Periphery II : This Time Is Personnal" que le dantesque et conceptuel "Juggernaut". Poursuivant sa destinée à la périphérie du djent, Periphery apparaît décomplexé dans ses envies d'efficience mélodique, donnant de plus en plus la primauté à la sensibilité sur la technique, et parvient à innover en douceur avec les apports réussis dans les arrangements. "Select Difficulty" est un excellent album particulièrement abordable qui prouve une fois de plus que Periphery avance avec intelligence.