C’est sur le label Frontiers Records que sort ce 19ème album de Journey qui coïncide avec les trente ans de carrière du groupe. Frontiers est en pleine expansion et voit sûrement dans cette signature une belle occasion de se faire plus largement connaître. En ce qui me concerne, j’étais plus que perplexe car, alors que le groupe semblait connaître une nouvelle jeunesse depuis l’arrivée au chant de l’excellent Steve Augeri, passer de Sony à Frontiers ressemblait fortement à une résignation sur le plan commercial.
Le moins que l’on puisse dire est que la musique proposée sur « Generations » semble confirmer cette dernière hypothèse. Si « Arrival » ressemblait à un très réussi best-of (ou worst-of si on n’apprécie pas le style) de tous les grands hits de Journey des années 80, « Generations » se situe quasiment à l’opposé, mettant sûrement en évidence la facette la moins commerciale du groupe. Les titres les plus FM « A place in your heart » et la ballade « Knowing that you love me », pourtant loin d'être désagréables, sont d’ailleurs les plus laborieux car ils semblent « forcés » au vu de la tonalité générale du disque.
« Generations » est en fait dans la lignée du EP « Red 13 ». Le style est plus rugueux, plus 70’s et met plus de temps à se dévoiler que ses prédécesseurs. La qualité mélodique est pourtant toujours au rendez-vous à l’image de l’excellent titre d’ouverture « Faith in the heartland », « Believe » dominé par les claviers ou encore « Out of harm’s way » qui est sûrement mon titre préféré. « A better life » et « Butterfly » sont deux ballades, plutôt non conventionnelles pour du Journey car totalement dépourvues de la moindre accroche, qui elles aussi finissent par séduire par leur côté intimiste. Le reste est composé de morceaux plus orientés rock'n'roll mâtiné de blues plutôt efficaces à l’exception peut-être de « Gone Crazy » chanté par Ross Valory dont le timbre de voix n’est pas des plus séduisants.
Journey a eu en effet l’idée curieuse de faire participer tous ses membres au chant : curieuse car si remplacer Steve Perry dans le cœur des fans était une tâche loin d’être évidente, Steve Augeri s’en acquittait parfaitement (à mon sens il est même beaucoup moins limité) et il est dommage de le voir un peu en retrait sur ce disque. Le pari est néanmoins plutôt réussi, le batteur Deen Castronovo s’en sort notamment très bien sur « A better life » et le bonus-track « It’s never too late ».
Même si « Generations » risque de décevoir pas mal de fans et si ses titres risquent d’avoir du mal à trouver leur place sur scène, il est réjouissant de voir qu’après 30 ans de carrière, Journey parvienne à trouver une sorte de second souffle. « Generations » est finalement le parfait complément d’ « Arrival » et s’avère en définitive hautement recommandable.