Bien que d'un niveau encore très élevé, "Goats Head Soup" (1973) voyait les Rolling Stones marquer légèrement le pas après la série d'albums légendaires qui le précédait. Convaincus de ne plus avoir grand-chose à apprendre de Jimmy Miller, Mick Jagger et Keith Richards décident de prendre en main la production de leur nouvel opus sous un patronyme qui deviendra légendaire: The Glimmer Twins. Chassés de tous les pays où ils séjournent, les Stones se retrouvent à Munich pour l'enregistrement de ce "It's Only Rock'n Roll" à la pochette décorée par une œuvre du dessinateur belge, Guy Peellaert. Comme l'indique son titre, cet album est réalisé dans un esprit résolument plus rock, dont peu de titres s'éloigneront.
De l'introductif 'If You Can't Rock Me', aussi classique qu'efficace avec son riff et son refrain imparables et ses guitares musclées et complémentaires, au blues-rock court et enjoué d'un 'Short And Curlies' renforcé par le piano bastringue de Ian Stewart, les occasions de tenter des déhanchements dignes de Mick Jagger ne vont pas manquer. Le sommet est représenté par le titre éponyme, véritable tube irrésistible doté de paroles en forme d'autodérision. Il est à noter que ce morceau est inspiré par un certain Ron Wood (ex Jeff Beck Group et ex The Faces), qui vient également prêter main forte à la section guitaristique, et qui prendra la suite de Mick Taylor au sein du groupe dès l'album suivant. A noter également la reprise du 'Ain't To Proud To Beg' des Temptations qui est une véritable réussite sous une forme de rock-soul accrocheur renforcé par un piano entraînant, ainsi que 'Time Waits For No One', pop-rock au accents hispaniques à la Santana illuminé par un long solo final de Mick Taylor. Ces deux titres se révèlent également incontournables.
Le reste se révèle plus inégal, oscillant entre le prévisible, le dispensable et le surprenant. Dans la première catégorie, les deux ballades ('Till The Next Goodbye' et 'If You Really Want To Be My Friend') n'apportent pas grand-chose, la seconde ayant même tendance à s'éterniser malgré le renfort des membres du groupe soul Blue Magic dans les chœurs. Dispensables sont le reggae-rock 'Luxury' qui traîne trop en longueur et tourne en rond, alors que le rock 'Dance Little Sister' se révèle beaucoup trop répétitif et ne met pas en valeur un nouveau superbe solo de Mick Taylor. Heureusement, cette deuxième partie d'album décevante est partiellement sauvée par le dernier titre 'Fingerprint File'. Aussi prenant que surprenant, ce titre marie funk et rock qu'il unit avec un riff lourd et dansant pour un résultat envoûtant sur plus de six minutes.
Sans morceaux réellement faibles et continuant à offrir un lot non négligeable de titres taillés pour la légende du Rock, "It's Only Rock'n Roll" confirme néanmoins le léger déclin engagé par son prédécesseur. Il reste désormais à savoir si les changements de line-up qui se profilent permettront aux Rolling Stones de retrouver un nouvel élan, tout en gardant à l'esprit qu'il n'y a pas encore péril en la demeure, les Britanniques continuant à offrir des opus bien supérieurs à la moyenne.