Au XVIème siècle, le navigateur portugais Fernand de Magellan avait connu une gloire posthume en organisant le premier tour du monde de l´humanité. Quatre siècles et quelques balbutiements plus tard, un autre Magellan nous conduisait sur les chemins escarpés du globe. Formé par les frères Gardner (Trent au chant et aux claviers, Wayne à la guitare) et d'un troisième larron, Hal Imbrie à la basse, le groupe était signé par Magna Carta. Sorti en 1991, "Hour Of Restoration" était pour sa nouvelle maison de disques à l´image de "Tubular Bells" pour Virgin, mais sans les mêmes retombées économiques.
L´auditeur a à peine le temps de boucler sa ceinture que le voyage démarre sur des chapeaux de roue. 'Magna Carta' s'avère un passeport efficace pour circuler, à l´image de la pochette, dans les sphères de Magellan. Les guitares tranchent des arpèges hard voire metal (comme plus tard sur ´Breaking These Circles´) à toute vitesse sous l'oeil froid des boîtes à rythmes et des claviers plus chaleureux. Utilisant des choeurs en guise de refrain, le groupe se plaît à bouleverser les signatures rythmiques, multipliant les changements de tempo et les breaks vertigineux. Le chant très puissant et volontaire de Trent Gardner apporte toute la conviction nécessaire pour illustrer cette musique particulière, sans cesse sur le point d´entrer en éruption. Un second voyage au long cours 'Union Jack' lui permet de passer de la rage à l'émotion en un clin d'oeil, tout comme dans son dialogue avec les choeurs sur 'Another Burning'. Deux autres morceaux courts, 'Just One Bridge' et 'Turning Point', offrent un peu de répit et le dernier cité permet de conclure l´album sur une promesse de paix et d´amour.
Trent Gardner était un passionné d´histoire et de littérature. Les paroles sont copieuses en qualité et en quantité et principalement trempées dans l´acide. L´analyse de ces dernières révèle une image peu reluisante de notre monde dominé par l´égoïsme ('The Winner'), les guerres inutiles entre les hommes ('Another Burning', 'Union Jack' qui annonce 'Hundred Year Flood'), brocardant au passage un patriotisme de papier mâché ('Friends Of America'). Seule la volonté de tous les acteurs peut permettre de reconstruire ensemble un monde meilleur ('Magna Carta', 'Turning Point', 'Breaking These Circles').
Si "Hour Of Restoration" anticipe les succès du metal prog à la Dream Theater, il n´en aura jamais les mêmes répercussions, soit en raison d´une volonté farouche de se passer de promotion, soit à cause de l´absence d´un véritable batteur (sans pour autant que l´écoute de cet album en soit pénalisée). En passant du prog au hard sans jamais prendre le temps de séjourner suffisamment de temps dans l´un des deux pôles, le groupe paiera cher ses choix extrêmes.