Roxy Music revient presque un an jour pour jour avec son quatrième opus, "Country  Life", qui a la lourde tâche de succéder à un album moins enthousiasmant que les précédents. Pour la première fois dans l’histoire du groupe, le line-up n’a pas bougé ce qui, en la circonstance, n’est pas forcément de bon augure. Et pourtant, Roxy Music va vite nous démontrer que son petit passage à vide n’était qu’un incident de parcours.

Car ‘The Thrill of it All’ qui ouvre l’album renoue avec ces rocks directs et décalés dont Roxy Music a le secret, tout à la fois dansant et décadent. Porté par la guitare en verve de Manzanera et le vibrato mondain de Ferry, le titre rappelle irrésistiblement ‘Do The Strand’, l’excentricité en moins. Ne s’arrêtant pas en si bon chemin, le groupe aligne ensuite quatre titres tout aussi dynamiques, que ce soit ‘All I Want is You’ aussi enthousiasmant et tubesque que le morceau d’ouverture, la ballade mid-tempo ‘Three and Nine’ sur laquelle Ferry prouve ses talents d’harmoniciste, le désenchanté et orientalisant ‘Out of the Blue’ ou le plus basique et sudiste ‘If It Takes All Night’. Une première face plutôt ébouriffante et sans temps mort.

La seconde face s’ouvre sur les deux titres les plus calmes et les plus étranges de l’album. ‘Bitter-Sweet’ dégage une ambiance de cabaret allemand d’entre-deux-guerres (les passages chantés en allemand, à la fois décadents et martiaux, n’étant pas étrangers à cette impression), le piano et la voix de Ferry menant une danse sombre, inquiétante et romantique avec laquelle Roxy Music retrouve son meilleur côté expérimental. ‘Triptych’ souffre un peu de la cohabitation malgré ses effets moyenâgeux, ses chœurs baroques et sa voix fantomatique.

Des trois rocks qui ferment la marche, ‘Casanova’ est le plus réussi, dansant et barré. ‘A Really Good Time’ et ‘Prairie Rose’, sans être désagréables, sentent un peu la redite et se montrent un peu trop sages, pas suffisamment inventifs ou irrévérencieux pour retenir l’attention.

Malgré cette fin un peu moins inspirée, "Country Life" est un très bon album, plus dense que son prédécesseur, et qui doit être savouré comme il se doit car le dernier de la grande époque du groupe.

Impossible de clore cette chronique sans dire un mot de la pochette. Cette fois, ce n’est pas un, mais deux mannequins qui ornent celle-ci, deux demoiselles suffisamment dévêtues pour que la prude Amérique, suivie par quelques autres pays, ne la censure en zoomant sur leurs visages pour ne pas être choquée par leur lingerie transparente. A l’instar de la musique, cette pochette est la dernière qui sera audacieuse. Roxy Music va tourner la page en passant à des choses plus consensuelles et plus lisses.