Avec les succès remportés par les deux précédents albums, Focus a le vent en poupe. Après une tournée florissante, Pierre Van Der Linden, le frénétique batteur, donne son bon de sortie. Colin Allen, batteur anglais de blues, ayant tourné entre autres avec Bob Dylan, le remplace. Les quatre hommes accouchent d'un quatrième album qui, malgré son titre, est bien un album studio.
A nouveau, le groupe nous embarque pour un voyage au long cours qui culmine avec son titre éponyme de plus de vingt minutes. Ce plat de résistance nous offre, après une fluide introduction dans laquelle basse et claviers jouent à l'unisson, un riff de guitare imparable, qui sera le fil conducteur de ce morceau de choix. Si les claviers et les guitares tentent quelques échappées en solitaire, le thème de Jan Akkerman revient toujours sur leurs talons. Les rares moments de chant utilisent à nouveau le yodel comme sur leur titre le plus célèbre. La voix de Thijs Van Leer propose une riche palette allant de l'aigu au grave, modulant des sonorités tantôt italiennes, tantôt inventées. Le jeu de Collin Allen, le nouveau venu, se montre assez sobre par rapport à son prédécesseur, mais capable d'instaurer une tension tout au long du morceau.
Pour autant si cet hamburger est bien digeste, les assaisonnements qui l'entourent ne nous laissent pas non plus sur notre faim. Le groupe retrouve sa fougue sur 'Harem Scarem' dont le titre évoque 'Hocus Pocus', grâce à ses ruptures de rythme, ses soli enflammés de guitare, son chant rauque qui culmine en aigu. L'humour du groupe ne prend jamais le pas sur la musique comme sur le titre suivant qui mêle à la solennité des claviers des paroles en français sur la cathédrale de Strasbourg, accompagnées de choeurs sarcastiques imitant le bruit des cloches. Le goût pour les musiques d'autrefois se retrouve sur le court instrumental 'Delitae Musicae', duo médiéval entre la flûte et la guitare acoustique et avec l'utilisation du clavecin sur 'Birth', un morceau pourtant hard, mais sur lequel Thijs Van Leer nous offre un étourdissant solo de flûte.
Avec "Hamburger Concerto", Focus nous régale les oreilles. Malgré des titres assez longs, l'auditeur ne sent jamais l'ennui pointer son nez. Cet album réunit tous les ingrédients qui font la sauce Focus, une sauce relevée, technique, sensible et parfois amusante. Hélas, le groupe hollandais ne fera peut-être jamais aussi bien.