Grisé par l'échec de ses deux précédents albums, Thijs Van Leer a décidé de placer Focus sous sommeil en 1978. Sept ans plus tard, poussé par sa nouvelle maison de disques Vertigo, le flûtiste a décidé d'approcher Jan Akkerman, qui a accepté de faire son retour au sein du groupe. Pour leur prêter main-forte, le groupe s'est offert des musiciens de studio aux noms exotiques. Le combo qui n'est plus que l'ombre de lui-même peut-il à nouveau rayonner avec le retour de ses deux têtes pensantes?
Après un album marqué par le funk et un autre en collaboration avec le chanteur P.J. Proby, l'identité de Focus n'en finit pas de dégringoler. Certes, on retrouve le Focus intégralement instrumental, mais les attentes portées sur celui-ci sont déçues. Les morceaux s'apparentent à des boucles sonores répétant des formules ad nauseam ('Russian Roulette', 'Le Tango'), donnant cruellement l'impression d'écouter des musiques dépourvues de droit, voire de musique d'ascenseur et non celles du flamboyant groupe hollandais. Les deux longues pistes se révèlent particulièrement indigestes et manquent cruellement d'intérêt. 'Beethoven's Revenge', en plus de son titre maladroit, peine à séduire en raison de son caractère répétitif, malgré son utilisation de sons électroniques. 'Who's Calling' fait illusion quelques instants grâce à ses soli de guitare, avant de retomber dans la nasse.
Comme le titre de l'album le suggère, Focus est réduit à son binôme. Jan Akkerman apporte des soli de guitare inspirés (quelques riffs hard sur 'Le Tango' et 'Ole Judy') mais sans la moindre parcimonie, ce qui rapproche le trop du pas assez. Thijs Van Leer s'en sort un peu mieux : 'King Kong' et 'Ole Judy' avec leur flûte qui émerge d'une ambiance tropicale, ou 'Indian Summer', avec son thème de synthétiseur, nous montrent que le groupe aurait pu s'adapter aux années 80, s'il avait daigné soigner sa copie. Les invités font pâle figure et par moments surnage la triste impression d'écouter deux hommes jouer sur des bandes enregistrées. En outre, la prise de son de la batterie, mixée trop haut, étouffe les orchestrations.
Cette retrouvaille de Jank Akkerman et de Thijs Van Leer n'est pas placée sous le signe de la réussite. Le temps d' ''Hambuger Concerto'' est révolu. Si le groupe retrouvera plus tard un regain d'intérêt avec le retour de Pierre Van Der Linden, les années 80 ont eu raison de sa créativité et nul doute que l'enregistrement de cet album n'était que contractuel, et que nos deux hommes savaient qu'ils n'étaient plus dans le coup.