Alors que la reformation de Triumph en 2008 n'aura rien offert d'autre que des prestations live et une compilation de remix, le guitariste et chanteur de la légende canadienne a finalement décidé de se faire plaisir en montant un nouveau projet intitulé Resolution 9. Bâti en compagnie de ses inséparables compères Dave Dunlop et Steve Skingley, et du batteur Paul DeLong (Roger Hodgson entre autres), le groupe nous offre un album intitulé "Res9" sur lequel quelques invités de marque viennent faire des apparitions remarquées. Car c'est la crème du rock canadien qui vient partager les réjouissances de Rik Emmett et de ses amis. Si la présence sur un titre de Gil Moore et Mike Levine, ses compères au sein de Triumph, n'a rien de surprenant, celles de Alex Lifeson (Rush) et James LaBrie (Dream Theater) ne risquent pas de passer inaperçues.
Pourtant, n'allez pas imaginer qu'il s'agisse ici d'une surenchère de démonstrations techniques de la part d'artistes voulant en imposer à leurs camarades de jeu. Bien au contraire, "Res9" est un exemple de feeling et d'authenticité. Le talent des musiciens est indéniable mais il est ici mis au service de titres respirant l'honnêteté et traduisant une prise de plaisir incontestable. Bien que les racines blues puissent être considérées comme le fil conducteur de l'ensemble, Rik Emmett ne se fixe pas de limite et s'aventure sur différents territoires pour la plupart illuminés de soli du maître des lieux et de son alter-ego Dave Dunlop. Du boogie 'Stand Still' à l'irrésistible riff ZZ Topien, au puissant 'End Of The Line' ondulant entre heavy rock et hard-rock et déversant un déluge de guitares sur son final, les ambiances sont variées sans pour autant perdre en cohérence.
Après que Alex Lifeson ait enrichi le mélodique 'Human Race' de sa guitare aérienne, et que James LaBrie ait offert de superbes chœurs et harmonies vocales à 'I Sing', ballade introspective et élévatrice, Rik Emmett nous offre une déclinaison du blues en trois tableaux. A la fois émouvant et éthéré, 'My Cathedral' lance une série complétée par un 'Ghost Of Shadow Town' plus sombre et mélancolique, et conclut par un 'When You Were My Baby' plus mid-tempo aux touches latinos, faisant parfois penser à Santana. A chaque fois, les soli enlacent l'auditeur dans un tourbillon de délicates émotions. Sans être désagréable, la suite est plus dispensable avec plusieurs titres de courte durée avant que le monumental 'End Of The Line' ne vienne conclure l'ensemble avec classe. En guise de rappel, Rik Emmett offre un titre bonus en compagnie de Gil Moore et Mike Levine avec un 'Grand Parade' mélancolique et légèrement jazzy, véritable témoignage de l'amitié unissant les trois hommes.
S'il n'a rien de révolutionnaire, "Res9" n'en est pas moins un délicieux moment de rock mélodique et bluesy. Rik Emmett y fait preuve d'une grande liberté et d'une authenticité incontestable et laisse à sa guitare (et à celles de ses amis) une place que cet instrument remplit avec talent. Un album à conseiller à ceux qui préfèrent privilégier l'émotion à l'originalité.