Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'avec leur premier album ("Steel The Light" - 1984), les Américains de Q5 avaient frappé un grand coup. Leur hard-rock oscillant entre la frange mélodique du style et la N.W.O.B.H.M. en provenance de Grande Bretagne, était d'une efficacité redoutable, renforcé par le jeu du guitariste Floyd Rose, créateur du fameux guitare-trémolo portant son nom. Malheureusement, le second opus ("When The Cracks Mirror" - 1985) ne confirma pas ce coup de maître inaugural et le groupe se sépara peu après. Reformé en 2014 pour un one-shot à l'occasion du Sweden Rock Festival, le combo US nous propose finalement un nouvel album intitulé "New World Order".
Il est toujours difficile de savoir à quoi s'attendre dans le cadre de ce type de reformation, d'autant qu'ici, le line-up est sérieusement modifié avec l'absence de Floyd Rose et de Gary Thompson, remplacés par Dennis Turner et Jeffrey McCormack. Lorsque l'on sait l'importance du premier nommé dans l'identité artistique du quintet, il y a de quoi être inquiet. En effet, quel intérêt peut avoir le retour d'un groupe n'ayant sorti que deux disques plus de 30 ans au préalable ? La réponse est malheureusement la suivante : rien, ou presque ! De nouvel ordre mondial, il n'est ici question que dans le titre, car Q5 semble être resté cryogénisé durant toute cette période, que cela soit au niveau des compositions, ou même de la production. Seule la voix de Jonathan Scott K. n'a pas résisté à l'épreuve du temps. Souvent à la limite de la sortie de route ('New World Order', 'A Warrior's Song', 'Get Next To You'), elle n'est pas sans rappeler celle de Marc Storace (Krokus) et donc logiquement, Bon Scott. Il est cependant possible de retrouver quelques intonations faisant penser à Biff Byford (Saxon), ce qui peut se comprendre par l'influence de la légende britannique sur les compositions de Q5.
Car c'est également un des principaux handicaps de cet album : le manque d'originalité. 'Tear Up The Night', 'Halfway To Hell', 'Fear Is The Killer'... La liste est longue des titres semblant tout droit sortis de la discographie de Saxon. Au milieu de cette ombre prégnante, se glissent quelques autres références sorties des années 80. Tokyo Blade sur 'One Night In Hellas', Damn Yankees sur un 'We Came To Rock' au refrain hymnique déjà entendu 1000 fois et pompé sur 'Don't Tread On Me', Krokus sur 'The Right Way', Manowar et Iron Maiden sur 'Unriquited (A Woman Of Darkness And Steel)', ou Def Leppard sur l'instrumental 'March Opus 206', sont autant de modèles mal digérés qui questionnent sur la nécessité de sortir un tel album, même si l'interprétation instrumentale est sans faille, en particulier au niveau de la paire de guitaristes qui tricotent sévère.
Si vous n'avez pas connu les années 80 et qu'aucun album de hard-rock de cette époque n'est jamais parvenu à vos oreilles, il vous sera possible de vous laisser prendre par quelques titres bien carrossés et aux refrains accrocheurs. Par contre, si vous êtes un tant soit peu amateur du genre, même si vous ne passerez pas un moment désagréable, nous vous conseillerons de ne pas perdre de temps et, quitte à découvrir ce groupe, à vous diriger vers "Steel The Light" dont l'intérêt est largement supérieur, surtout placé dans son contexte historique.