Il y a deux ans, les Norvégiens de Seven Impale avait fait forte impression sur la rédaction de Music Waves avec leur premier album, "City of the Sun". Du moins, sur sa partie la moins effarouchée par les dissonances et audaces inventives. Car Seven Impale ne fait assurément pas partie des groupes qui se soucient de caresser leur public dans le sens du poil dans l’espoir d’une quelconque reconnaissance médiatique.
Et ce n’est pas ce "Contrapasso" qui va changer la donne. Vous avez aimé le premier album ? Vous avez des chances que celui-ci vous plaise. On y retrouve la même atmosphère oppressante, les mélodies sombres et désespérées, des musiques éruptives victimes de nombreuses cassures de rythmes, des instruments survoltés qui, menés par un sax souvent possédé, n’hésitent pas à être dissonants ou saturés et un chant investi et théâtral parfois à la limite de la rupture.
Néanmoins, "Contrapasso" marque une certaine évolution par rapport à son prédécesseur. L’album semble plus maîtrisé, moins chien fou, les brusques turbulences de "City of the Sun" cèdent le pas à des rythmes toujours aussi syncopés mais plus construits, voire hypnotiques. Les mélodies bien que toujours anguleuses et inconfortables sont plus nettes, les passages en free style moins fréquents. L’impression de maelström ou d’éruption volcanique laissée par le premier album est moins prégnante.
De là à dire que ce disque est reposant, il y a un pas que nous ne franchirons pas. Le bien nommé ‘Convulsion’ (celle dont l’auditeur fragile risque d’être pris à son écoute) est un titre cataclysmique où instruments et voix se fondent dans un magma éruptif éreintant d’où ne ressortent que saturations, dissonances et agressivités. Moins essoufflant mais toutefois bouillonnants, ‘Heresy’ et ‘Inertia’ ressemblent à une épreuve de force dont on ressort éreinté mais curieusement satisfait. Mais nombre de titres sont plus calmes, à commencer par ‘Langour’ et son sax… langoureux, ou les hypnotiques ‘Helix’ et ‘Serpentstone’ s’enroulant sur eux-mêmes pour mieux développer leurs thèmes.
Malgré la longueur de l’album, la densité de la musique et son abord un brin rébarbatif, aucune lassitude ni fatigue ni impression de redite ne sont ressenties à l’écoute des huit premiers titres. Dommage que "Contrapasso" se termine sur le long et expérimental ‘Phoenix’, instrumental figé dans ses boucles et ostinatos successifs qui peinent à imposer leur caractère hypnotique.
Néanmoins, ce léger faux-pas ne remet pas en cause la qualité de l’album dont la musique exigeante et complexe se fait à la fois cérébrale et viscérale. Seven Impale s’est éloigné des improvisations à la King Crimson pour se rapprocher d'un hybride entre VDGG (la noirceur, les dissonances) et Beardfish (l’agressivité, le grain de folie). "Contrapasso" agacera ceux qui ne conçoivent pas la musique autrement qu’harmonieuse mais ravira tous ceux qui recherchent aventure et dépaysement.