Originaire de Bâle, le quatuor de Ticket to the Moon s’est fait connaître en publiant en 2012 un premier album, "Dilemna on Earth", auquel succède quatre ans plus tard " Æ Sense of Life" qui nous intéresse aujourd’hui.
Ancré dans un metal progressif assez dépouillé, le style de TTM se caractérise par des riffs assez simples, sans grande signature, et une utilisation mesurée des claviers, souvent réduits à de discrets accompagnements (à l’exception notable du piano dans 'Fœtus' et 'Perpetual'), ce qui donne souvent l’impression d’avoir affaire à un trio.
L’écriture de " Æ Sense of Life" sacrifie à la tendance cinématographique du moment, un procédé qui consiste encore plus que l’atmosphérique à vouloir faire coller des motifs musicaux à une ambiance ou une histoire. D’où l’utilisation de samples démonstratifs (souffle oppressé dans 'Conformism', ambiance maritime dans 'Father') ou de récitatifs ('Perpetual', et surtout une minute de discours en allemand sur 'Conformism', c’est long !). L’utilisation finale du texte de Chaplin ('Hynkel' du "Dictateur") participe du même genre de fausse bonne idée, la musique couvrant les paroles ou l’inverse et rendant le tout indigeste.
Cette manie de se cacher derrière un procédé privilégiant le sens à la musicalité est un facteur limitant majeur pour cet opus, car musicalement certains morceaux ('The Call Within') apparaissent plutôt creux. Cette impression est renforcée par le côté minimaliste des arrangements, minimalisme heureusement contrebalancé par la variété de thèmes proposés par moments : 'Perpetual' et surtout 'Resurrection' se hissent au-dessus de cette monotonie.
Autre élément pénalisant, le chant est sans relief et proposé dans un anglais à l’accent approximatif. Les parties vocales sont réduites, ce qui limite la casse, mais 'Fœtus' est plombé par ce défaut. Avec une rythmique plutôt conventionnelle - il est difficile de se contenter d’une batterie aussi linéaire -, les morceaux peinent à produire l’émotion auxquels ils prétendent par leur écriture ambiancée.
A trop vouloir donner du sens aux morceaux aux dépens de l’originalité musicale, Ticket to the Moon n’évite pas les pièges d’une écriture trop balisée. L’auditeur habitué à des compositions plus denses et musicalement plus structurées peinera à s’immerger dans un univers trop et mal délimité.