En 1996, le G3 crée un événement dans le monde de la guitare rock moderne avec la première édition d’une tournée organisée par Joe Satriani, avec la participation fidèle de Steve Vai, qui voit un trio de guitaristes se succéder lors d’une soirée dédiée aux amoureux de l’instrument. Pour cette première édition c’est Eric Johnson qui est choisi pour accompagner les deux virtuoses et c’est à cette occasion que votre serviteur fait la connaissance de ce musicien.
Eric Johnson est un discret guitariste texan de 62 ans respecté pour son éclectisme et son style personnel par le monde de la guitare. Hermétique aux effets de mode et de manche, Johnson a toujours privilégié la qualité à la quantité. Pour preuve, depuis son premier album "Seven Worlds" en 1978 l’Américain n’a sorti que huit albums, soit un album tous les 4 ans et demi, lui laissant le temps de peaufiner ses travaux et de se rendre disponible pour les nombreuses sollicitations de ses collègues musiciens. Après un bien nommé "Eclectic" en 2014 avec Mike Stern, Eric Johnson est déjà de retour, pour notre plus grand plaisir, avec "EJ".
Les deux initiales du titre et la forme toute acoustique laissent entrevoir un disque sous forme d’introspection. C’est effectivement l’idée de départ de Johnson que d’interpréter un album épuré en gardant toute l’authenticité possible que permettent de restituer les conditions réelles d’enregistrement. Eric Johnson a bâti un "EJ" qui lui ressemble, distingué, sensible et généreux avec deux reprises, un tiers d’instrumentaux et le reste de chansons.
Chaque morceau de "EJ" se présente comme autant d’indices sur une partie de l’identité musicale d’Eric Johnson qui s’incarne aussi bien dans la sérénité d’une pièce de guitare acoustique hispanisante (‘Serinidad’) ou aux harmonies folk apaisantes (‘Fatherly Downs’, 'All Things You Are', 'Song For Irene'), que dans la douceur mélancolique d’une ballade chantée (‘Wonder’, Wrapped In A Cloud’, ‘November’), la puissance d’une instrumentale en picking (‘Once Upon A time In Texas’) ou aux cadences dansantes d’un jazz des années 50 (la reprise de Les Paul et Mary Ford ‘The World Is Waiting For The Sunrise’).
Eric Johnson met à l’honneur les instruments acoustiques comme la guitare et le piano qui, en solitaire ou en accords, renforcent le rendu organique et la chaleur de ses compositions. Elles sont particulièrement bien agrémentées par la finesse des arrangements de violon et violoncelle que l’on peut entendre dans le funky ‘Wrapped In A Cloud’, ‘November’ ou la reprise de Jimi Hendrix ‘One Rainy Wish’ dans une intelligente version jazz à la superbe conclusion cathartique.
Eric Johnson fait une fois de plus démonstration de sa grande classe dans ce court "EJ" à la dimension intimiste d’une irrésistible élégance. Par son interprétation vocale toujours pleine de retenue et de réconfort, et les émotions pudiques qu’il communique à travers ses mélodies, Eric Johnson ouvre toutes les portes qui mènent au cœur de ses auditeurs.