Arkan
est de retour après un changement de line-up important, car Sarah a
bel et bien quitté la
barque... certes ce départ est cruel car la voix de la belle manque au groupe. Toutefois, Manuel (The Old Dead Tree) vient grossir les rangs, alors que certains autres sont
partis voguer vers d'autres horizons sur le navire Acyl. Ces
bouleversements induisent nécessairement des changements de la couleur musicale de ce groupe ainsi renouvelé.
Le
premier contact avec "Kelem" se
fait par un visuel magnifique, une œuvre
sombre et percutante, un travail d'orfèvre dans la
lignée de Paradise Lost. On ressent déjà de façon très intime
que la musique sera très sombre, comme une nouvelle
incarnation écrasée de soleil de The Dead Old Tree.
L'album précédent ("Sofia") avait divisé les adorateurs historiques, suscitant des controverses tant il se suivait l'évolution actuelle de Orphaned Land : la voix
féminine y était très présente, les instruments orientaux nombreux, et l'aspect lourd et poisseux mis un peu en retrait. Arkan
s'était donc quelque peu éloigné de son style originel... Mais cette époque semble révolue car "Kelem" prend le parti de revenir à un son rugueux et
à des vibrations presque démoniaques.
C'est
ainsi que même si 'Kafir' démarre avec une guitare douce, sous forme d'une ballade mélancolique world music, la piste se mue rapidement en metal gorgé de mazout et de poisse, emmenée par une six-cordes qui aspire l'espace sonore. Puis la batterie impose un rythme harassant, alors que la voix entonne des lignes mélodiques qui se retiennent si
facilement. Dès ce début, les musiciens nous démontrent par A + B qu'ils peuvent toujours faire des prouesses avec leur metal ethnique, brûlant, rageur et hyper-mélodique.
"Rien
de nouveau sous le soleil de Satan" me direz-vous... Attendez tout de même avant de crier victoire, car cette nouveauté tant attendue se retrouve
peut-être dans les instruments folkloriques multiples qui livrent une partition
chaleureuse ou cette guitare chaude aux harmonies orientales qui ne sont plus simplement qu'un habillage folklorique un peu caricatural, mais sont la moelle substantielle des chansons de "Kelem"...
La seconde piste débute de manière similaire même si le rythme
est plus syncopé et les voix enregistrées qui surnagent ici et là, rappellent Dream Theater et l'univers complexe du metal progressif. Puis, au sein
de cette piste, après une virée solitaire mélodique, retentit la voix crasseuse, emplie de colère de
Florent qui est passé maître dans l'art
du cri rocailleux et inhumain.
Dès lors, Arkan se délecte des enchaînements
de climats : après des introductions
savoureuses, il balance un bon vieux riff en béton armé qui se marie à merveille avec les vibrations folkloriques, ou manie la colère ('Erhal') et libère un enfer
vocal fait d'humeurs suintantes
et de vers putrides.
Back
to basics...
Arkan
retourne
aux sources de son inspiration, aux années qui ont donné naissance
au grandiose "Hilal". Il revient aux origines de son talent
quand il suivait les pas d'Orphaned Land, mais entendons-nous bien, l'époque où les israéliens avaient enfanté du magnifique
"Mabool", rondelle sur laquelle la colère et la beauté se livraient un combat infini sur les dunes du désert de Gobi.
"Kelem" est une rondelle
grandiose qui remet en lumière
le groupe, le confirme en tant que acteur musical majeur bien de chez nous. Est-ce dû au départ de Sarah ?
à l'arrivée de Manuel ? ou peut-être plus simplement à l'envie
d'en découdre à nouveau, à une inspiration retrouvée qui marie avec plaisir le crasseux et le divin, la lumière et l'obscurité de manière si bouleversante...