A chaque nouvel album, un changement de line-up. Oui, mais à chaque nouvel album, une évolution, voire une progression notable. Voilà qui pourrait résumer le début de carrière des Suédois de Miss Behaviour et de leurs trois premiers opus. Avec le dernier en date, "Double Agent" (2014), ils avaient marqué le monde de l'AOR avec une œuvre de qualité, efficace et personnelle. Certains risquent donc de s'angoisser à la vue d'une formation stable pour la première fois de l'histoire discographique des Scandinaves. Mais qu'ils se rassurent, car le quintet poursuit son ascension vers les sommets du genre en continuant à enrichir sa musique de nouveaux éléments et de nouvelles influences.
"Ghost Play", nouvelle livraison produite par Patrick Magnusson (Crashdiet, etc.), débarque sur nos platines en cette fin d'année et il y a fort à parier qu'elle va y tourner pendant quelque temps. Le son est une fois de plus parfait, alliant puissance et clarté, et la formation d'Erik Heikne et Henrik Sproge réussit à nouveau à surprendre l'auditeur sans le désorienter pour autant. Miss Behaviour se permet de durcir le ton sur plusieurs titres et d'inclure quelques éléments progressifs qui ne sont pas sans rappeler les légendaires Canadiens de Saga. Cette influence se ressent parfois au détour de guitares véloces ('Friendly Fire') ou de changements de tempo à l'occasion de certains soli ('Savage Heart'). Les claviers aux sonorités aériennes pourraient également rappeler la formation des frères Crichton mais comme elles sont souvent utilisées dans le cadre de l'AOR / hard mélodique scandinave, l'inspiration est moins évidente.
Un des tours de force de Miss Behaviour est de glisser ces évolutions au sein de sa musique sans la dénaturer pour autant. Bien sûr, la voix particulière de Sebastian Roos reste un point de repère évident, tout comme les soli partagés entre guitares et claviers, mais l'efficacité qui marquait le précédent album reste également d'actualité. Certains refrains s'ancrent dans les neurones pour ne plus en sortir pendant plusieurs jours ('Pain And Passion', 'Savage Heart', 'Never Say Never'), même si ils ne sont pas toujours évidents au premier abord ('Friendly Fire', 'The Magician'). Les ballades sont toujours aussi réussies, traduisant la profondeur des sentiments dans une ambiance atmosphérique ('The War Inside'), ou faisant preuve d'une grande délicatesse pour un atterrissage tout en douceur s'appuyant sur un simple duo chant / piano à peine renforcé de très légères nappes de claviers ('Save The World'). Enfin, si "Ghost Play" n'inclue pas de titre de longue durée, comme c'était le cas sur ses prédécesseurs, il n'évite pas certaines approches plus ambitieuses. C'est particulièrement le cas sur le morceau éponyme alternant les ambiances et les breaks pour un résultat final qui en laissera plus d'un sans voix.
Chaque titre mériterait que nous nous y attardions, mais l'auditeur s'en chargera lui-même en découvrant les richesses écoute après écoute. Avec "Ghost Play", les Suédois gravissent encore un nouveau palier dans leur progression, réussissant à évoluer sans dénaturer une identité déjà affirmée. Accessible sans être simpliste, leur AOR de grande classe ravira aussi bien les amateurs de mélodies immédiates que ceux plus exigeants qui apprécient des œuvres plus progressives. Tout en s'ancrant clairement dans le paysage mélodique scandinave, Miss Behaviour en devient un leader original et incontournable.