"Back To The Blues" (2001) avait marqué le retour de Gary Moore vers les rivages blues-rock qui avaient fait son succès une petite décennie plus tôt. En compagnie de ses amis Cass Lewis et Darrin Mooney, il avait enfoncé le clou avec leur projet commun intitulé Scars ("Scars" - 2002), bien que l'approche se soit révélée plus root. Toujours accompagné par le batteur de Primal Scream, voyant le retour à ses côtés du fidèle bassiste Bob Daisley (Ozzy Osbourne, Uriah Heep, etc..) et enregistrant la coopération du claviériste Jim Watson, l'Irlandais revient avec un nouvel opus dont le titre ne laisse que peu de doute sur le contenu : "Power Of The Blues".
Pourtant, ceux qui s'attendent à une œuvre respectant un cahier des charges bien balisé et sans prise de risque vont être surpris. Le titre éponyme a le mérite de mettre tout le monde dans le bain sans préambule. Puissant et tranchant, alternant les passages cinglants et saturés avec d'autres plus groovy, il laisse immédiatement paraître l'approche plus hard-rock d'un Gary Moore qui semble ainsi vouloir brasser ses différentes influences. Il faut dire qu'il est aidé en cela par une section rythmique sans concession. Entre la basse prégnante d'un Bob Daisley qui n'a pas l'habitude de faire le déplacement pour passer inaperçu, et le jeu riche et dynamique de Darrin Mooney, le guitariste-chanteur se retrouve avec deux réacteurs qui le poussent dans ses derniers retranchements.
En dehors de la ballade suave et old-school d'un 'That's Why I Play The Blues' mélancolique et se révélant être une véritable confession, le deux premiers tiers de l'album font montre d'attaques tranchantes et d'une puissance de tous les instants. La power-ballad 'There's A Hole' déverse ainsi une douleur sans fard au travers d'un chant et d'une guitare déchirés. Même les reprises n'échappent pas à cette approche incandescente, comme le célèbre 'I Can't Quit You Babe' bien plus cinglant que d'habitude et traversé par une guitare tranchante. Quant au 'Memory Pain' de Percy Mayfield, s'il reste sexy et ondulant, il bénéficie cependant d'attaques embrasées de la part de la six-cordes. Bien qu'énergique, 'Can't Find My Baby' revient sur des rivages plus classiques avec des claviers vaporeux et une ambiance digne de Chicago, avant que 'Torn Inside' ne se fasse crépusculaire pour un atterrissage tout en douceur.
Alors qu'il semblait permettre à Gary Moore de revenir sur des terres plus classiques après son expérience avec Scars, "Power Of The Blues" propose un étonnant mariage entre hard-rock et blues. A ceux qui pensaient qu'après "Back To The Blues", l'Irlandais allait tranquillement continuer sa carrière sans ne plus prendre de risque, cet opus révèle un artiste en pleine forme et rempli d'énergie, et qui n'a pas fini d'explorer de nouveaux paysages musicaux sans pour autant dérouter l'auditeur.